Entre modestie et résistance : la mise en mots du décret sur les ORS¹

Introduction

Les professionnels de la documentation occupent une place stratégique et centrale au sein des organisations en raison de leur niveau de formation et de la relation privilégiée qu’ils entretiennent avec l’information, à savoir leur « sensibilité informationnelle » pour reprendre l’expression de Claude Baltz (2003, p. 152). En tant qu’experts de la pédagogie de l’information-documentation, centrés sur l’éducation des élèves, les professeurs documentalistes sont également sensibles au contexte actuel de l’information et de ses désordres, auxquels s’ajoutent la crise sanitaire et son lot de désinformation. Sur le terrain de l’établissement scolaire, leur mandat pédagogique n’a jamais trouvé autant de légitimité à s’exercer. Un mandat conforté par leur circulaire de missions réactualisée en 2017 qui place, en premier axe, leur fonction d’« enseignant et maître d’œuvre de l’acquisition par tous d’une culture de l’information et des médias2 » en reconnaissant ainsi leur expertise pédagogique dans le champ des Sciences de l’information et de la communication (SIC). À ce titre, ils forment « tous les élèves à l’information documentation » en tant que champ d’intervention distinct de l’ÉMI. Le décret sur les ORS3 devrait conforter la légitimité de ce mandat pédagogique, mais comment s’applique-t-il sur le terrain de l’établissement scolaire et selon quelles modalités ? Sept ans après la parution du décret, où en sont les professeurs documentalistes à ce sujet ? Pour le savoir, nous avons envoyé un sondage anonyme sur les listes de diffusion académique et nationale des professeurs documentalistes à la suite duquel nous avons recueilli 276 réponses4. Nous préciserons tout d’abord le profil des répondants avant de proposer, ensuite, une lecture explicative du décret à partir de leurs témoignages. Leurs mots, qui constituent la matière première de notre réflexion, conduiront le lecteur, dans un dernier temps, à entrer en profondeur dans les résultats du sondage. Entre modestie et résistance, la mise en mots du décret sur les ORS dit « quelque chose » de la manière dont les professeurs documentalistes se perçoivent et se considèrent comme enseignants.

Qui sont les 276 répondants ?

En raison de la période chargée de fin d’année scolaire, nous avons opté pour un sondage court et articulé uniquement autour de deux questions : une question fermée, afin d’identifier le type d’établissement des répondants et une question ouverte visant à recueillir leurs témoignages spontanés :
« Appliquez-vous le décret ORS dans votre établissement ? Si oui, merci d’indiquer de manière explicite les modalités de son application (récupération horaire hebdomadairement, mensuellement, en fin d’année, paiement en heures péri-éducatives, autres…). Si non, merci d’indiquer explicitement les obstacles que vous rencontrez quant à son application. »
172 répondants sont professeurs documentalistes en collège, 50 exercent en lycée général et technologique, 26 en lycée professionnel et 28 au sein de structures mixtes.
Nous les avons répartis en trois catégories :
– 60 % déclarent ne pas appliquer le décret sur les ORS. Ce chiffre est identique à celui obtenu par le SNES à la suite de l’enquête menée en janvier-avril 20205.
– 31 % déclarent l’appliquer.
– 9 % ne répondent pas précisément à la question : oui et non, partiellement, occasionnellement, en partie, à demi, officieusement…
Le graphique ci-dessous indique la répartition des trois catégories en fonction du type d’établissement.

Graphique. Les 276 répondants appliquent-ils le décret sur les ORS ?

Décryptage, précisions et éclairages

J’ai mis le BOEN en copie au chef d’établissement, la première fois, il a répondu que c’était statutaire et ne s’y opposerait pas. Prof doc en lycée général et technologique

Le décret du 20 août 2014 relatif aux ORS des enseignants est un acte réglementaire pris par le gouvernement et signé du Premier ministre. En tant que représentant de l’État, le chef d’établissement est le garant de l’application des textes normatifs au sein de l’établissement scolaire. Ce décret abroge celui de 1950 qui régissait jusqu’alors le statut et les services des enseignants en incluant désormais les professeurs documentalistes dans un texte commun à tous les enseignants. Leur service hebdomadaire y est clairement défini. Nous soulignons cette avancée même si l’application du décret peut se révéler inégale sur le terrain ; nous y reviendrons dans un instant.
L’article 2 du décret définit ensuite les obligations réglementaires de service qui diffèrent selon le corps des enseignants [certifiés, agrégés, professeurs de lycée professionnel (PLP), professeurs des écoles (PE), professeurs d’éducation physique et sportive (EPS)] puis, par dérogation à ces obligations, l’article précise les dispositions particulières qui s’appliquent aux professeurs « de la discipline de documentation » :
« Par dérogation aux dispositions des I et II du présent article, les professeurs de la discipline de documentation et les professeurs exerçant dans cette discipline sont tenus d’assurer : – un service d’information et documentation, d’un maximum de trente heures hebdomadaires […] ­– six heures consacrées aux relations avec l’extérieur qu’implique l’exercice de cette discipline6. »
Qu’ils soient ainsi certifiés (18 h) ou agrégés (15 h), recrutés par la voie du CAPES de documentation ou non, les professeurs documentalistes doivent un service hebdomadaire de 30 h dans l’établissement. Le décret prend donc en considération le fait que de nombreux enseignants de corps différents (PLP, PE, EPS…), déjà titulaires d’un autre concours, se sont orientés vers la documentation.

Qu’est-ce qu’une « heure d’enseignement » ?

Je souhaitais récupérer mes heures pédagogiques, nous avons eu un désaccord avec le chef d’établissement. L’inspectrice a tranché : seules les heures d’AP, inscrites à l’emploi du temps des élèves, peuvent être récupérées. Je n’interviens pas dans le cadre de l’AP. Prof doc en collège

La mention « heure d’enseignement » apparaît officiellement dans le décret :
« Ce service peut comprendre, avec accord de l’intéressé, des heures d’enseignement. Chaque heure d’enseignement est décomptée pour la valeur de deux heures pour l’application du maximum de service prévu à l’alinéa précédent7 ».
L’information-documentation n’étant pas une discipline institutionnalisée, cette mention peut effectivement prêter à confusion comme en témoigne ce prof doc en collège. Pour la préciser, un détour par la circulaire d’application du décret du 29 avril 2015 semble nécessaire. Celle-ci précise que les heures d’enseignement correspondent « aux heures d’intervention pédagogique devant élèves telles qu’elles résultent de la mise en œuvre des horaires d’enseignement définis pour chaque cycle », et ce, « quel que soit l’effectif du groupe d’élèves concerné8 ». Conséquemment, et compte tenu de la situation singulière des professeurs documentalistes, nous définissons la mention « heure d’enseignement » comme une heure de face à face pédagogique devant élèves, prévue dans les grilles horaires du cycle, quel que soit le nombre d’élèves, en présence ou en l’absence d’enseignants disciplinaires, dans ou hors du CDI. Le décret étant silencieux sur ces deux derniers points, il convient d’envisager ces éventualités.
Si l’on s’en tient alors à la définition du décret de 2014 et de sa circulaire d’application de 2015, les « heures d’enseignement » des professeurs documentalistes ne dépendent absolument pas d’un quelconque emploi du temps hebdomadaire CDI inscrit à l’emploi du temps des élèves. Une précision s’impose, puisque cet élément peut constituer un point de désaccord entre les professeurs documentalistes et leur hiérarchie comme en témoigne le prof doc en collège. L’information-documentation n’étant pas une discipline institutionnalisée, elle n’a donc pas d’horaire d’enseignement dédié pour chaque cycle. Par conséquent, et pour être en cohérence à la fois avec le décret sur les ORS et la circulaire de missions, un professeur documentaliste qui assure une heure d’enseignement devrait se trouver alors :
– en face à face pédagogique devant élèves, ce qui signifie en situation de transmettre des notions info-documentaires qui visent l’appropriation de savoirs et de compétences propres à « une culture de l’information et des médias » lesquels sont inscrits dans les programmes disciplinaires ;
– en face à face pédagogique sur une heure dédiée à un enseignement disciplinaire et/ou aux dispositifs éducatifs officiels tels que les Enseignements Pratiques Interdisciplinaires (EPI) en collège, l’Accompagnement Personnalisé (AP) en collège et en lycée ou le chef d’œuvre en lycée professionnel.
Nous savons pourtant que, dans les faits, des professeurs documentalistes obtiennent des heures dédiées ajoutées à l’emploi du temps des élèves. Mais ce cas n’est pas pris en considération par le décret sur les ORS. Situer son action pédagogique dans ce cadre revient, dès lors, à prendre un risque, puisque la récupération des heures d’enseignement effectuées pourrait être acceptée ou refusée selon la volonté du chef d’établissement. Inscrire son action pédagogique dans des horaires « officialisés », dédiés aux enseignements disciplinaires et/ou aux dispositifs éducatifs, revient ainsi à limiter ce risque en situant son intervention pédagogique « dans la norme » édictée par le décret.

1 heure d’enseignement effectuée = 2 h de récupération sur le service hebdomadaire de 30 h

Je suis dans un établissement de près de 700 élèves. La Principale voulait que je prenne les 6e toute l’année. Je lui ai dit OK si j’applique le décret (même si je ne demandais pas 7 heures de récup, donc 7 h de fermeture du CDI), elle m’a rétorqué que ce décret ne s’appliquait pas pour ces heures de 6e. Elle refuse également que je fasse une banque de temps pour récupérer quand il y a moins de travail. Concernant les heures faites avec mes collègues, jamais je n’ai décompté. Prof doc en collège

Le décret sur les ORS précise enfin qu’1 heure d’enseignement devant les élèves vaut 2 heures « de service de documentation et d’information ». Chaque heure d’enseignement effectuée étant ainsi décomptée pour la valeur de 2 heures du service hebdomadaire de 30 h. Le prof doc en collège déclare, ci-dessus, assurer 7 heures d’enseignement par semaine. Si le décret s’appliquait « strictement », les 7 heures d’enseignement comptant pour 14 h de service, ses obligations hebdomadaires passeraient donc de 30 h à 23 h9. Ce témoignage n’est pas le seul à soulever les difficultés d’application du décret et notamment l’impossibilité d’une application « stricte ». D’autant plus qu’un seul poste de certifié de documentation à 30 h ne permet déjà pas une ouverture du CDI sur l’ensemble des horaires d’ouverture de l’établissement. Pourtant 31 % des répondants déclarent appliquer ce décret. Comment s’y prennent-ils alors ? Pour le savoir, entrons plus en profondeur dans les résultats du sondage.

Entre application officielle et petits arrangements officieux

Application officielle : bricolages et braconnages

Oui. Temps de présence prévue de 28 h hebdomadaire au lieu de 30 h et souplesse d’emploi du temps en fin d’année quand il n’y a plus d’élèves. (C’est en théorie, parce qu’en pratique, j’ai bien du mal à ne pas faire beaucoup plus d’heures). Prof doc en lycée général et technologique

L’expression « application officielle » désigne une application du décret qui fait l’objet d’un accord établi et reconnu dont les modalités sont acceptées par le chef d’établissement et le professeur documentaliste puis diffusées à l’ensemble de la communauté éducative. Une diversité de modalités d’application ressort des témoignages des répondants qui affirment appliquer le décret sur les ORS :


– 60 % disent effectuer une récupération hebdomadaire : leurs services se situant entre 24 h minimum et 28 h maximum au lieu de 30 h ;
– 16 % déclarent récupérer leurs heures durant les derniers jours de l’année. Parmi-eux, 4 répondants disent juxtaposer cette récupération en fin d’année scolaire avec un décompte hebdomadaire à l’instar de ce prof doc en lycée général et technologique ;
– 11 % déclarent être payés en heures supplémentaires (notamment en lycée), en heures péri-éducatives, en heures de vacation ou en heures dédiées à des dispositifs tels que devoirs faits (notamment en collège)10. Parmi-eux, 2 répondants disent juxtaposer une récupération hebdomadaire avec un paiement en heures péri-éducatives ;
– 9 % déclarent ensuite capitaliser leurs heures sous la forme d’un « réservoir » dans lequel ils piochent, au coup par coup, en fonction de leurs besoins, sous la forme d’une demande d’autorisation d’absence sans récupération. Un professeur documentaliste en collège nous en donne une illustration précise :

Chaque fin de mois, je fais un bilan écrit à mes chefs d’établissement des heures d’enseignement effectuées. Ces heures constituent un «réservoir» dans lequel je pioche en cas de besoin : absence maladie d’une journée, absence personnelle, arrêt quelques jours avant la fin de l’année… Concrètement, cette année, j’en ai récupérées environ 40 %. Prof doc en collège

Parmi-eux, 3 répondants affirment cumuler ce réservoir avec un décompte hebdomadaire.
– 2 % enfin disent récupérer mensuellement et trimestriellement leurs heures mais sans préciser le volume horaire global récupéré.
Alors même que ces professeurs documentalistes disent appliquer le décret sur les ORS, certains soulèvent par ailleurs les difficultés rencontrées face à un texte impossible à appliquer à la lettre qui génère des inégalités de traitement au sein de la profession. 9 % considèrent que l’application du texte dépend, d’une part, du bon vouloir du chef d’établissement et qu’il convient, d’autre part pour 5 % des répondants, de renégocier à chaque changement de direction. Cette situation conduit les professeurs documentalistes à toute sorte de bricolages, sous la forme d’empilement de modalités de récupération pour faire valoir leur droit à la reconnaissance des heures d’enseignement effectuées. Si le décret fait mention explicitement d’une récupération hebdomadaire, force est de constater que des modalités d’application variées sont mises en œuvre. Cette diversité témoigne de braconnages, à savoir de manières de faire singulières et originales en fonction des réalités concrètes de terrain et de la place de chacun au sein de son établissement scolaire. Des braconnages qui peuvent conduire à la résistance face aux difficultés d’application du décret comme l’illustrent les propos des répondants de la troisième catégorie (voir graphique supra).

Application « officieuse » : des braconniers ou des résistants ?

Oui je récupère 2 h dans mon emploi du temps hebdomadaire, sans accord préalable de la direction, qui ne m’a jamais fait de remarque à ce sujet. Prof doc en lycée général, technologique et professionnel

9 % des sondés ne répondent pas précisément à la question posée relative à l’application ou pas du décret. Dans cette troisième catégorie, des témoignages font état de récupérations horaires « officieuses » dont le prof doc en lycée ci-dessus. Finalement, que peut-on opposer à un enseignant qui ne fait qu’appliquer la loi ? 24 % des répondants de cette catégorie déclarent effectuer un décompte hebdomadaire et, parmi-eux, 16 % précisent que ce décompte est de 28 h/semaine au lieu de 30 h. Un sentiment de colère et d’injustice s’exprime à travers leurs témoignages face à un statut bâtard, à l’invisibilité de leur travail, de leur fonction, et face à ce qu’ils ressentent comme du mépris. Cette colère conduit certains d’entre eux, dont ce prof doc en lycée, à développer des stratégies de résistance qui sont le signe du combat mené sur le terrain pour faire valoir leur droit à la reconnaissance de leur mandat enseignant au prix de petits arrangements officieux avec le chef d’établissement qui prennent la forme d’accords ponctuels et tacites demeurant néanmoins fragiles car non pérennes. En effet, ces répondants savent parfaitement qu’en cas de changement de direction, les compteurs seraient remis à zéro les obligeant, sans doute, à entamer de nouvelles négociations.
Toutefois ces petits arrangements officieux ne sont pas propres à cette troisième catégorie puisque 4 % des répondants, qui déclarent ne pas appliquer le décret, font état de récupérations horaires sans accord « officiel » avec leur hiérarchie. Zoomons sur la catégorie la plus importante de notre échantillon.

Quels sont les éléments qui font obstacle à l’application du décret ?

(S’est) rendu coupable de fermer le CDI aux usagers

J’hésite beaucoup à demander l’application du décret car je rechigne à fermer le CDI pour compenser des heures d’enseignement qui ont déjà impliqué une fermeture du CDI au grand public pour des séances prévues avec des classes : cela fait un peu «double peine» pour les autres élèves qui peuvent avoir le sentiment de voir tout le temps le CDI fermé ! Ce décret n’est donc pas forcément la meilleure approche. Prof doc en collège

60 % des répondants déclarent ne pas appliquer ou ne pas parvenir à obtenir l’application du décret. La question de l’ouverture du CDI demeurant le point de discorde principal entre chefs d’établissements et professeurs documentalistes dans les négociations portant sur cette application. 26 % n’appliquent pas le décret en raison du refus du chef d’établissement tandis que 25 % affirment refuser volontairement cette application à cause de la fermeture du CDI qu’elle occasionnerait. Le témoignage ci-dessus illustre parfaitement cette situation. Le dilemme auquel est confronté tout professeur documentaliste qui souhaite appliquer le décret, entre l’accueil des usagers – qui le contraint alors à limiter les temps de fermeture du CDI – et la reconnaissance de sa fonction enseignante – mais sans pour autant léser les usagers – se traduit par l’expression d’un sentiment de culpabilité qui peut le conduire à une forme d’auto-censure. Ce sentiment de culpabilité n’est cependant pas l’apanage des 60 % qui déclarent ne pas appliquer le décret puisque parmi ceux qui disent l’appliquer, la fermeture du CDI reste encore une préoccupation majeure :

Je compte les heures à priori pour l’année (projets, EPI, AP) et je répartis. Je m’arrange pour ne pas trop dépasser (environ 80 heures) afin de ne pas trop fermer. Je répartis les fermetures 1 h/jour et 2 heures le vendredi pm. Prof doc en collège (qui applique le décret)

Ce prof doc en collège détaille ainsi les stratégies de comptage opérées pour minimiser l’impact de sa récupération sur l’ouverture du lieu. Si une application « stricte » du décret paraît difficile, faut-il pour autant que les professeurs documentalistes renoncent à faire valoir leur droit à la reconnaissance des heures d’enseignement effectuées ? L’application du décret semble s’accompagner d’une réflexion qui porte, d’une part, sur l’appartenance du professeur documentaliste au lieu CDI (qui revient à confondre le lieu et la personne), et d’autre part, sur les obstacles à l’exercice de son mandat pédagogique qui sont induits par l’amalgame de son temps de service avec l’ouverture du lieu. Les professeurs documentalistes sont-ils les seuls habilités à ouvrir et fermer le CDI pour en assurer la fonction d’accueil ? Portent-ils seuls la responsabilité de cette « double peine », exprimée par le prof doc en collège, en introduction de cette partie, ou s’agit-il plutôt d’une responsabilité partagée qui incomberait en premier lieu au chef de l’établissement ?
Si la circulaire de missions précise que « les heures d’enseignement sont effectuées dans le respect nécessaire du bon fonctionnement du CDI », elle ne dit pas, en revanche, que ce « bon fonctionnement » dépend du seul service du professeur documentaliste, ainsi que de sa seule responsabilité, d’autant plus que cette circulaire précise, de surcroît, que les modalités d’intervention pédagogique des professeurs documentalistes s’étendent au-delà des frontières du CDI :
« Le professeur documentaliste contribue à l’acquisition par les élèves des connaissances et des compétences définies dans les contenus de formation […], en lien avec les dispositifs pédagogiques et éducatifs mis en place dans l’établissement, dans et hors du CDI11. »
Dans le cadre d’une négociation visant ainsi l’application du décret, la mention « dans et hors du CDI » permettrait de plaider en faveur d’une responsabilité partagée du lieu et pour que le service hebdomadaire de 30 heures, qui incombe au professeur documentaliste, ne soit pas considéré comme un temps d’ouverture/fermeture du lieu. S’il est souhaitable enfin qu’un dialogue se mette en place avec la hiérarchie pour que le « bon fonctionnement » du CDI soit assuré, celui-ci ne peut se passer d’une réflexion sur l’amalgame du professeur documentaliste au lieu CDI tout autant que sur l’équilibre de ses missions.

Enseignement + ouverture culturelle + accueil des usagers et gestion des ressources = réflexion sur l’ordre des priorités

J’avoue que je n’ai pas voulu aller me battre auprès de mes chefs pour le faire appliquer…. Encore des arguments, des tensions, voire des conflits…. Je me suis épargné ça… Prof doc en collège

23 % des répondants qui déclarent ne pas appliquer le décret justifient cette non-application en raison de la position inconfortable d’être dans la demande, de réclamer une « faveur », d’avoir à se justifier. « Encore des arguments » nous dit ce prof doc en collège alors qu’un professeur documentaliste dit ne pas vouloir mendier l’application d’un texte qu’on ne devrait pas argumenter tandis qu’un autre avoue ne pas oser demander. Comme ce prof doc en collège, 8 % craignent que leurs demandes ne débouchent sur une situation de conflit et renoncent, de ce fait, à faire valoir leur droit à la reconnaissance des heures d’enseignement effectuées, d’autant que les témoignages soulignent l’isolement et le manque de soutien de l’inspection à ce sujet. 2 % disent ne pas appliquer le décret eu égard à l’opposition des inspecteurs tandis que 5 % évoquent l’inertie de l’inspection établissements et vie scolaire (EVS). Un manque de soutien qui renforce encore davantage l’isolement des professeurs documentalistes.
5 % déclarent ensuite ne pas appliquer le décret parce qu’ils assurent un nombre trop important d’heures d’enseignement qui impliquerait, ipso facto, une fermeture presque complète du CDI :

Avec presque 12 heures de séances devant élèves chaque semaine, je ne vois pas cela du tout réalisable. Prof doc en collège

Des professeurs documentalistes manifestent leur crainte de se voir retirer des heures d’enseignement parfois durement acquises en cas d’application du décret. Cette situation qui constitue pourtant une double infraction au regard de l’axe 1 de la circulaire de mission et du décret sur les ORS, appelle le soutien des enseignants disciplinaires de l’établissement lequel peut se révéler un précieux atout pour constituer une force de négociation afin d’arriver à un accord dans l’intérêt de la communauté. Toutefois l’absence de réflexion quant à l’équilibre des missions et à l’ordre des priorités, que les professeurs documentalistes se fixent, peut conduire à des contradictions flagrantes illustrées par le témoignage du prof doc en collège ci-dessus. Alors que le décret sur les ORS rappelle la quotité de service d’un certifié de discipline qui est de 18 h (hors EPS) et d’un agrégé qui est de 15 h, ce professeur documentaliste accepte d’exercer 12 h d’enseignement en plus des autres missions afférentes à la fonction de professeur documentaliste et sans reconnaissance des heures d’enseignement effectuées. Avec 12 heures d’enseignement par semaine, comment parvient-il à concilier les missions d’accueil des usagers au CDI, de gestion des ressources documentaires et d’ouverture culturelle de l’établissement ?
Le témoignage de ce prof doc en collège, qui n’est pas un témoignage isolé, soulève un certain nombre de questionnements : toutes les activités pédagogiques menées par les professeurs documentalistes donnent-elles forcément lieu à ce « face à face pédagogique » évoqué précédemment lors du décryptage du décret (voir point 1) ? Toutes les activités pédagogiques menées placent-elles forcément les professeurs documentalistes en situation de transmettre des savoirs et compétences info-documentaires selon un scénario pédagogique élaboré en amont et pour lequel il possède une expertise ? En définitive, qu’est-ce qu’« enseigner » et « transmettre » signifient pour les professeurs documentalistes ? Une application du décret qui prendrait en compte le « bon fonctionnement du CDI » devrait inclure une réflexion sur l’équilibre des missions qui incombent aux professeurs documentalistes et sur le rapport de chacun à la fonction enseignante.
La politique documentaire pourrait, à cet égard, s’avérer utile pour réfléchir sur cet équilibre puisqu’elle comprend « la définition des modalités de la formation des élèves » comme le stipule la circulaire de missions de 2017. D’autant plus que, parmi les raisons avancées par les répondants qui refusent volontairement l’application du décret, 4 % disent manquer de temps pour assumer toutes les tâches inhérentes à leur fonction et 4 % estiment leur charge de travail trop lourde pour un seul poste de professeur documentaliste. Sur ces deux points pourtant, le manque de moyens et les sous-effectifs impactent l’ensemble des enseignants quelles que soient leurs disciplines. La politique documentaire pourrait alors devenir le point d’appui d’une réflexion concernant l’équilibre des missions qui incombent aux professeurs documentalistes dont, prioritairement, la formation des élèves. Elle serait enfin un garde-fou essentiel face à une application du décret qui dépendrait du seul bon vouloir d’un chef.

Du manque d’information à la méconnaissance de ses droits

Parmi les raisons invoquées justifiant la non-application du décret figure, dans une moindre mesure, le manque d’information qui fait obstacle, selon nous, à la constitution d’une réelle force de négociation12. 2 % des répondants, qui déclarent ne pas appliquer le décret, avancent ne pas connaître son existence tandis que 3 % déclarent que les heures d’enseignement effectuées ne correspondent pas à la définition qu’en donne le décret. Sur ce dernier point, nous renvoyons à notre explication de la mention « heure d’enseignement ». Les répondants soulèvent ensuite deux éléments liés tout d’abord à la préparation des séances pédagogiques au CDI puis à la co-animation avec les enseignants de disciplines qui entraveraient, selon eux, l’application du décret. Concernant le premier élément, 5 % affirment ne pas appliquer le décret à cause du temps de préparation de leurs séances qui se déroule au CDI alors que, dans ce cas précis, le décret s’applique au même titre qu’un enseignant qui corrigerait ses copies ou préparerait un cours durant un temps d’évaluation des élèves. Concernant la co-animation pédagogique, lorsque deux enseignants disciplinaires assurent un enseignement en commun, chacun est payé une heure. Pourquoi le professeur documentaliste ne serait-il pas logé à la même enseigne que ses collègues ?
Pour finir, le manque de clarté du texte est un facteur de difficultés pour 5 % des 276 répondants. Si les témoignages soulèvent en effet l’existence d’un texte flou et interprétable, ces caractéristiques ne sont pas propres au décret sur les ORS. Les recherches menées dans le champ des SIC par Claire Oger et Caroline Ollivier-Yaniv ont soulevé les contraintes qui pèsent sur la production des discours institutionnels et les procédés de lissage qui dessinent les contours d’un discours neutre en apparence caractérisé par un effacement de toute réalité de terrain et de toute trace de conflictualité (Oger et Ollivier-Yaniv, 2006). L’imprécision du décret ne serait-elle pas liée, avant tout, à la singularité pédagogique des professeurs documentalistes ? Sans classes attitrées, sans discipline institutionnalisée, sans heures dédiées, pourtant… ils enseignent. Car quelle que soit la position des 276 répondants à l’égard du décret, seul 1 % dit ne pas assurer (ou très peu) d’heures d’enseignement tandis que 22 % affirment en assurer plus qu’ils n’en déclarent réellement.

Conclusion

Entre modestie et résistance, la mise en mots du décret sur les ORS par les professeurs documentalistes dévoile leur rapport singulier et unique à la fonction enseignante. Dans ce texte de 2003 qui nous paraît si actuel, Claude Baltz soulevait le niveau d’exigence de la formation des professionnels de l’information-documentation en posant ce questionnement qui nous sert de réflexion conclusive : « A-t-on alors vraiment pris la mesure de la qualité des compétences ainsi constituées et, par contrecoup, du sous-emploi relatif de la plupart des documentalistes, une fois en activité ? » (2003, p. 149). Un sous-emploi préjudiciable à la mise en œuvre d’une éducation à l’information et aux médias qui constitue pourtant un enjeu de société. Une éducation que seuls des enseignants formés, experts dans la pédagogie de l’information, du document et des médias dans une société où les technologies du numérique investissent la vie des élèves, sont en mesure d’assumer, d’assurer et d’en être les garants. Ils sont en cela des « cartographes et (…) passeurs de l’archipel des savoirs » (p. 153) pour reprendre les mots de Claude Baltz…
« Quand la documentation s’éveillera… ».

 

 

MÉMENTO
Rémunération, primes, indemnités, décompte d’heures…

 

Je suis professeur documentaliste,
voici ce à quoi je n’ai pas droit

– Indemnité de suivi et d’orientation des élèves (ISOE) : Taux annuel part fixe : 1 213,56 € / + part modulable (variable en fonction du niveau) pour la rémunération des fonctions de professeur principal ou référent.
> Décret n° 2021-1101 du 20 août 2021 modifiant le décret n° 93-55 du 15 janvier 1993 instituant une indemnité de suivi et d’orientation des élèves en faveur des personnels enseignants du second degré
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043950839
– Heures Supplémentaires à l’année (HSA) : Taux variable en fonction du corps et du grade (1 379,42 € pour 1 h à l’année pour un certifié classe normale). Heures supplémentaires annuelles, imposables dans la limite de 2 heures hebdomadaires en sus de leur maxima de service, qui figurent sur la VS (Ventilation de Service) signée au début de l’année et sont payées toute l’année, même pendant les vacances ou en période d’arrêt maladie. Ces heures concernent « L’ensemble de ces enseignants, à l’exception des professeurs documentalistes ».
> Missions et obligations réglementaires de service des enseignants des établissements publics d’enseignement du second degré. Circulaire n° 2015-057 du 29-4-2015
https://www.education.gouv.fr/bo/15/Hebdo14/MENH1506031C.htm
– Heures Supplémentaires Effectives (HSE) : Taux variable en fonction du corps et du grade (39,91 € par heure pour un certifié classe normale). Heures de face-à-face pédagogique ponctuelles :
« Situation particulière des professeurs documen­talistes [..] Les intéressés ne peuvent bénéficier d’heures supplémentaires ».
> Missions et obligations réglementaires de service des enseignants des établissements publics d’enseignement du second degré. Circulaire n° 2015-057 du 29-4-2015
https://www.education.gouv.fr/bo/15/Hebdo14/MENH1506031C.htm
– Prime d’équipement informatique : 176 € par an.
> Décret n° 2020-1524 du 5 décembre 2020 portant création d’une prime d’équipement informatique allouée aux personnels enseignants relevant du ministère chargé de l’éducation et aux psychologues de l’éducation nationale.
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000042614334

 

Je suis professeur documentaliste,
voici ce à quoi j’ai droit

– Décompte des heures d’enseignement (article 2 du décret ORS : chaque heure est « décomptée pour la valeur de deux heures » et pondération des heures d’enseignement (Article 6, 7, 8 du Décret ORS 2014).
– Indemnité de Sujétions Particulières (ISP). 1000 €/an, versée mensuellement.
> Arrêté du 17 février 2021 modifiant l’arrêté du 14 mai 1991 fixant le taux de l’indemnité de sujétions particulières allouée aux personnels exerçant des fonctions de documentation ou d’information dans un lycée, un lycée professionnel ou un collège :
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043178888
– Indemnité Éducation Prioritaire : taux annuel. Part fixe : REP+ = 5 114 € / REP = 3 302 €. Part modulable : jusqu’à 702 €.
> Décret n° 2021-825 du 28 juin 2021 modifiant le décret n° 2015-1087 du 28 août 2015 portant régime indemnitaire spécifique en faveur des personnels exerçant dans les écoles ou établissements relevant des programmes « réseau d’éducation prioritaire renforcé » et « réseau d’éducation prioritaire ».
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043711782
– Indemnité pour Missions Particulières (IMP) : 5 taux annuels forfaitaires de 312,50 €, à 3 750 €, en fonction de la mission (coordination, référent culture, numérique, décrochage, de tutorat…) et de la charge effective de travail.
> Circulaire n° 2015-058 du 29-4-2015. Modalités d’attribution de l’indemnité pour mission particulière (IMP).
https://www.education.gouv.fr/bo/15/Hebdo14/MENH1506032C.htm
– Accompagnement éducatif : Taux horaire : 30 €. Ne donne lieu à rémunération que si l’heure intervient en dépassement de la durée du travail réglementaire. Par exemple : « Devoirs faits » en collège.
> Décret n° 96-80 du 30 janvier 1996 relatif à la rémunération des personnes assurant les études dirigées ou l’accompagnement éducatif hors temps scolaire. Modifié par Décret n°2009-81 du 21 janvier 2009
https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000191170/
– Indemnité pour activités péri-éducatives : Taux horaire 23, 81 €. Pour rémunérer les heures consacrées à « l’accueil et l’encadrement des élèves en dehors des heures de cours ».
> Décret n° 90-807 du 11 septembre 1990 instituant une indemnité pour activités péri-éducatives en faveur des personnels enseignants des écoles, collèges, lycées et établissements d’éducation spéciale et des personnels d’éducation
https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000351634/
– Vacation : taux horaire : 13,72 € pour rémunérer un intervenant qui se voit confier « de manière ponctuelle, des tâches spécifiques d’enseignement, de formation, d’animation ou d’accompagnement de nature pédagogique ».
> Décret n° 2012-871 du 11 juillet 2012 relatif à la rémunération des intervenants chargés à titre accessoire de diverses tâches organisées par les écoles et les établissements d’enseignement relevant du ministère en charge de l’Éducation nationale : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000026174830/
Il est tout à fait possible de cumuler décompte, IMP et rémunérations d’heures ponctuelles.

 

 

Être noir en France : une identité complexe

Musées et expositions

Musées

Musée national de l’histoire de l’immigration
Présentation et analyse de l’histoire de l’immigration en France, depuis le début du XIXe siècle jusqu’à nos jours. Galeries permanentes en travaux jusqu’en 2023.
À découvrir : Histoire(s) de voir (films documentaires), Regards de photographes (entretiens et témoignages de photographes), Au fil du web (sélection de ressources sur l’histoire de l’immigration accessibles en ligne), etc.
http://www.histoire-immigration.fr/

Musée du quai Branly – Jacques Chirac
70 000 objets d’Afrique subsaharienne conservés provenant des anciennes collections du Musée de l’Homme et du musée national des arts d’Afrique et d’Océanie.
Possibilité d’activités à distance via la plateforme Zoom (conférences, contes, ateliers).
https://www.quaibranly.fr/fr/

Musée de l’Homme
À voir, le premier temps du parcours, les bustes du XIXe siècle présentant les différentes « races ».
https://www.museedelhomme.fr/

Fondation Dapper
Arts de l’Afrique d’hier et d’aujourd’hui.
http://www.dapper.fr/

Expositions itinérantes

ONAC VG : La dissidence en Martinique et en Guadeloupe
L’engagement des dissidents antillais qui ont participé à la libération des îles en juin et juillet 1943.
https://www.onac-vg.fr

ONAC VG : La Force noire
Histoire des Tirailleurs sénégalais depuis leur création par Napoléon III en 1857 jusqu’à nos jours.
https://www.onac-vg.fr

Fondation pour la mémoire de l’esclavage : C’est notre histoire
Histoire de l’esclavage, des abolitions et de leurs conséquences dans notre pays.
Disponible sur demande à la Fondation : education@fondationesclavage.org

Expositions en cours

Musée d’histoire de Nantes : L’abîme – Nantes dans la traite atlantique et l’esclavage colonial, 1707-1830 – Du 16 octobre 2021 au 19 juin 2022.
Exposition sur ceux qui furent victimes du système colonial à Nantes.
https://www.chateaunantes.fr/expositions/labime/

Expositions passées

Musée d’Orsay : Le modèle noir de Géricault à Matisse (2019)
À travers une centaine d’œuvres du XIXe siècle, cette manifestation explore la relation entre l’artiste et son modèle, le tout mis en relation avec les contextes politiques et sociaux de ces années.
https://www.musee-orsay.fr/fr/expositions/presentation/le-modele-noir-de-gericault-matisse-196083

Musée national d’Art moderne, La Villette, la Grande Halle : Magiciens de la terre (1989)
Cette exposition a offert au regard du visiteur des œuvres d’arts non occidentales contemporaines (plus de 100 artistes).
https://www.magiciensdelaterre.fr/

Dans les programmes

Collège

Histoire, cycle 4
BOEN n° spécial n° 11 du 26 novembre 2015
Thème 1 : La traite négrière Expansion, Lumières et révolutions
Thème 2 : Le monde et l’Europe au XIXe siècle ; sous-thème « conquêtes et sociétés coloniales »

Géographie, 4e
BOEN spécial du 26 novembre 2015
Thème 2 : « Les mobilités humaines transnationales »
Thème 3 : « Des espaces transformés par la mondialisation (Les dynamiques d’un grand ensemble géographique africain (au choix : Afrique de l’Ouest, Afrique orientale, Afrique australe) »

EMC, Cycle 3
Thème « La sensibilité : soi et les autres » • Respecter autrui et accepter les différences
Connaissances, capacités et attitudes visées : Respect des autres dans leur diversité. Respect des différences, tolérance.

Français, Cycle 4
Thème : La Fiction pour interroger le réel, agir sur le monde : possibilité d’étudier des romans sur l’esclavage

Histoire des arts, 3e
Thématique 8 : « Les arts à l’ère de la consommation de masse (1945 à nos jours) » • Un monde ouvert ? Les métissages artistiques à l’époque de la globalisation

Lycée général et technologique

Histoire, Seconde et première
BOEN n° 1 du 22 janvier 2019
2de : thème 4 – dynamiques et ruptures dans les sociétés du XVII et XVIIIe siècles – chapitre 2 : les ports français et le développement de l’économie de la plantation et de la traite
1re : thème 2 – La France dans l’Europe des nationalités : politique et sociétés 1848-1871 – Les idéaux démocratiques hérités de la Révolution française

EMC, Seconde générale et techno­­logique
BOEN spécial n° 1 du 22 janvier 2019
Thème annuel : « la liberté, les libertés » selon plusieurs axes :
Axe 1 : Des libertés pour la liberté ; libertés de l’individu et protection internationale des droits de l’homme ;
Axe 2 : Garantir les libertés, étendre les libertés : les libertés en débat (dont la reconnaissance des différences, la lutte contre les discriminations et la promotion du respect d’autrui : lutte contre le racisme, l’antisémitisme, la xénophobie), l’engagement au service des libertés (militants, citoyens, associations).

Sciences économiques et sociales, Terminale
Sociologie et science politique : Comment est structurée la société française actuelle ? Sous-thème des « identifications subjectives à un groupe social ».
Regards croisés : Quelles inégalités sont compatibles avec les différentes conceptions de la justice sociale ?

Français, Première
Arrêté du 17 janvier 2019 – objet d’étude
« La littérature d’idées, du XVIe siècle au XVIIIe siècle » : combats des Lumières et question de l’esclavage

Enseignement de spécialité « Humanités, littérature et philosophie », Première et Terminale
Entrées thématiques possibles :
En classe de première, au semestre 2 : « découverte du monde et pluralité des cultures »
En classe de terminale, au semestre 4 : « histoire et violence »

Voie professionnelle

Histoire, CAP
BOEN spécial n° 5 du 11 avril 2019 et BOEN spécial n° 1 du 6 février 2020
Thème 1 : La France de la Révolution française à la République : l’affirmation de la démocratie (suffrage universel et abolition de l’esclavage en 1848)

Seconde professionnelle
L’expansion du monde connu (XVe, XVIIIe siècles) : traite atlantique et code noir
L’Amérique et l’Europe en révolutions (1760-1804) : la révolution de Saint-Domingue

Géographie, Seconde et première
BOEN spécial n° 5 du 11 avril 2019
Seconde professionnelle : thème 2 : « Une circulation croissante et diverse des personnes à l’échelle mondiale »
Première professionnelle (BOEN spécial n° 5 du 11 avril 2019)
Thème 2 : « L’Afrique, un continent en recomposition »

EMC, CAP et Seconde professionnelle
Entrée en CAP : « Liberté et démocratie » en seconde
Première : « Égalité et Fraternité en démocratie »
Premier sous-thème du programme : « La Liberté, nos libertés, ma liberté » traite des garanties apportées par la Loi aux droits fondamentaux de l’Homme et du Citoyen dans un État de droit.

Programmes applicables dans les territoires ultramarins
Les programmes d’histoire-géographie des cycles 3 et 4 font l’objet d’adaptations publiées au BO n° 11 du 16 mars 2017, celles de seconde et première générale et technologique ainsi que de CAP et de seconde professionnelle ont été publiées au BO n° 30 du 23 juillet 2020.
Ces adaptations introduisent des angles d’approches spécifiques.

Pistes pédagogiques

Réaliser une exposition de personnalités françaises noires, afin de lutter contre les préjugés et de les ancrer dans l’histoire de France alors qu’ils sont trop souvent assimilés à des étrangers.

Emprunter une des expositions de l’ONACVG (Ex : la force noire).

En collaboration avec les professeurs d’histoire-géographie : faire des séances de recherches sur l’Afrique noire. Les objectifs sont de permettre aux élèves d’avoir une meilleure connaissance de ce continent, souvent présenté comme sous-développé, sans histoire et sans culture, etc.
Ces séances seront l’occasion de travailler la méthodologie de recherche sur internet avec les élèves : fiabilité des sources, sélection-prélèvement-traitement de l’information, etc.

Dans le cadre de l’EMC : organiser un débat pour déconstruire les stéréotypes dont sont victimes les personnes noires. Montrer les relations qui existent entre les préjugés et les discriminations.

En collaboration avec les professeurs de Français : faire un rallye-lecture avec une sélection de romans de littérature créole, et/ou d’auteurs noirs francophones.

En collaboration avec les professeurs d’arts plastiques : analyse d’images, vecteur privilégié de la diffusion des stéréotypes coloniaux et raciaux. Par exemple, utiliser les affiches de propagande coloniale.

En collaboration avec les professeurs d’EPS : travailler sur le racisme et les discriminations dans le sport, et notamment les discriminations entre Noirs et Blancs, en utilisant des articles de presse ou des extraits vidéos. On pourra étudier la place marginale occupée par les sportifs noirs dans les postes de direction, les préjugés raciaux sur les manières de jouer, les sélections selon des profils physiques racialisés, etc., dans le football, le basket, le rugby…

Dans le cadre de l’EMC, participer à un concours notamment « la Flamme de l’égalité ».

Concours

La Flamme de l’égalité
Ce concours doit permettre aux élèves de mener une réflexion citoyenne s’appuyant sur l’histoire de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions, de leurs survivances comme de leurs effets et de leurs héritages contemporains. Inscription : du 01/06/2021 au 31/03/2022
Thème du concours 2021-2022 : « Travailler en esclavage ».
https://www.laflammedelegalite.org/candidature.php

Nous Autres, Éducation contre le racisme
Concours parrainé par Lilian Thuram
Les élèves réalisent une production artistique qui illustre la déconstruction du racisme.
https://www.concoursnousautres.fr/

Journées

25 mars : « Journée internationale de commémoration des victimes de l’esclavage et de la traite transatlantique des esclaves » (Assemblée générale des Nations Unies)

10 mai : « Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leur abolition » (France, depuis la publication du décret n° 2006-388 du 31 mars 2006)

23 août : « Journée internationale du souvenir de la traite négrière et de son abolition » (UNESCO, en souvenir du soulèvement de Saint-Domingue)

2 décembre : « Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage » (commémore la date anniversaire de l’adoption par l’Assemblée générale des Nations Unies, de la convention pour la répression et l’abolition de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui en 1949).

23 mai : « Journée nationale en hommage aux victimes de l’esclavage colonial » France. Cette date rappelle le 23 mai 1848, où le décret Schoelcher du 27 avril 1848 abolissant l’esclavage entre en application sur le 1er territoire d’Outre-mer. Elle fait également écho à la marche silencieuse du 23 mai 1998)

Au niveau local
Pour des raisons historiques, dans certaines collectivités d’Outre-mer, il existe des journées spécifiques de commémoration (décret n° 83-1003 du 23 novembre 1983) :
– Le 27 avril à Mayotte ;
– Le 22 mai en Martinique ;
– Le 27 mai en Guadeloupe ;
– Le 27 mai à Saint-Martin ;
– Le 10 juin en Guyane ;
– Le 9 octobre à Saint-Barthélemy ;
– Le 20 décembre à la Réunion.

Lieux de mémoires et fondations

Le Mémorial ACTe (Pointe-à-Pitre, Guadeloupe), à la fois mémorial, musée, centre d’arts vivants et centre de congrès, inauguré en 2015.

Le Cimetière des âmes perdues (Saint Louis, La Réunion), où furent inhumés de nombreux esclaves travaillant dans les champs de canne à sucre aux XVIIe et XVIIIe siècle.

Cimetière des âmes perdues, Saint Louis, La Réunion

Le Mémorial de l’Anse Caffard (Le Diamant, La Martinique), édifié en 1998 à l’occasion du 150e anniversaire de l’abolition de l’esclavage, à proximité du lieu du naufrage d’un navire négrier en 1830.

Le Jardin du Luxembourg, à Paris, abrite un monument réalisé par Fabrice Hyber intitulé « Le cri, l’écrit », destiné à commémorer l’abolition de l’esclavage (inauguré le 10 mai 2007) et une stèle en hommage aux esclaves et à leur combat pour les droits de l’homme et la liberté (inaugurée le 10 mai 2011).

Le Mémorial de l’abolition de l’esclavage, à Nantes, l’un des principaux ports négriers de France.
https://memorial.nantes.fr/

Le Panthéon abrite la tombe de Victor Schœlcher, l’un des principaux auteurs de l’abolition définitive de l’esclavage en France, en 1848.
https://www.paris-pantheon.fr/#.
Joséphine Baker, résistante, militante antiraciste, artiste, a fait son entrée au Panthéon à l’automne 2021.

Source gallica.bnf.fr / BnF

Fondation pour la mémoire de l’esclavage (FME)
Outils pédagogiques, formation continue des enseignants et activités éducatives (concours scolaires, visite de sites mémoriels…)
https://memoire-esclavage.org/

Sitographie

Bibliographies sur les littératures jeunesse d’Afrique, de l’Océan Indien, de la Caraïbe et du monde arabe + des ateliers, des actualités, etc.
https://takamtikou.bnf.fr/

Métis, métissage – Réseau Canopé. Dossier : éduquer contre le racisme et l’antisémitisme
https://www.reseau-canope.fr/eduquer-contre-le-racisme-et-lantisemitisme/metis-metissage.html

Filmographie

Fictions

Kechiche, Abdellatif. Vénus noire. MK2, 2010, 204 min

Nakache, Olivier ; Toledano, Eric. Intouchables. Gaumont, 2011. 112 min

Sciamma, Céline. Bande de filles. Hold-up Films, Lilies Films, Arte France Cinéma, 2014, 112 min

Zadi, Jean-Pascal ; Wax, John. Tout simplement noir. Gaumont, 2020, 90 min

Zem, Roschdy. Chocolat. Mandarin éditions, 2016. 110 min


Documentaires

Barberi, Gianfranco ; Di Castri, Marco. Magiciens de la terre. Z’éditions, Centre Pompidou, 1989, 52 min

Boni-Claverie Isabelle. Trop noire pour être Française ? ARTE, 2015, 52 min.
https://www.youtube.com/watch?v=Md73-k26vdI

Cattier, Daniel ; Gélas, Juan ; Glissant, Fanny. Les routes de l’esclavage. ARTE France, Compagnie des Phares et Balises, Kwassa Films, RTBF, LX Filmes, RTP, Inrap, 2018, 4x 52 min

Dacourt, Olivier ; Sauvourel, Marc. Je ne suis pas un singe. Le Racisme dans le Football. CANAL+, 2019, 90 min

Diallo, Rokhaya. Où sont les noirs ?, RMCStory, 2019, 40 min

Gay, Amandine. Ouvrir la Voix. Arte, 100 min

Gelas, Juan ; Gelas, Pascal. Noirs De France, de 1889 à nos jours. La Compagnie des Phares & Balises, 2012, 180 min

Musée de L’immigration. Le film : deux siècles d’histoire de l’immigration en France
Ce film retrace en quarante minutes deux siècles d’histoire de l’immigration en France. (accompagné d’une séquence pédagogique à télécharger).
http://www.histoire-immigration.fr/ressources/histoire-de-l-immigration/le-film-deux-siecles-d-histoire-de-l-immigration-en-france

Réseau Canopé. Le racisme, c’est pas du sport ! Plateforme Les Fondamentaux, 5 épisodes (2 min 30 chacun)
Discipline : Les animations des Fondamentaux – Réseau Canopé (reseau-canope.fr)

Sadki, Florida. Dans les tranchées, l’Afrique : l’aventure ambiguë. Dimson, France 3 Lorraine-Champagne-Ardennes 2004, 52 min
Pendant la Première Guerre mondiale, l’armée française, manquant de soldats, enrôla 134 000 Africains dans ses rangs. Le film retrace les principales opérations militaires françaises, sur le front occidental. Intervention de spécialistes sur certains points : recrutement, rapports noirs-blancs, démobilisation, etc.

Radio

Diao Camille. Le Temps du débat : existe-t-il une identité noire en France ? France culture, le 14 août 2020, 42 min

Mauduit Xavier. Le Cours de l’histoire : Être noir en France avant l’abolition de l’esclavage. France Culture, 2021, 51 min.
« Du XVIe siècle jusqu’au XIXe siècle, plus de 18 000 gens de couleur résident sur le territoire métropolitain de la France. »
https://www.franceculture.fr/emissions/le-cours-de-lhistoire/etre-noir-en-france-avant-labolition-de-lesclavage

Rodrigues, Aurélie ; Pareja, Ninaet ; Carron, Christophe. Les Mémoires Vives. Musée d’histoire de Nantes, Slate, 2021, 3 épisodes (24 à 31 min)
Série de podcasts réalisés dans le cadre de l’exposition L’abîme. Nantes dans la traite atlantique et l’esclavage colonial, 1707-1830.

Représentations artistiques

JB Carpeaux. Pourquoi naître esclave [Why be born a slave ?]. Bronze, 1868.

Paul Gauguin (1848-1903). Tête de femme. Martinique. 1887, Craie de couleur sur papier. Van Gogh Museum, Amsterdam

Ousmane Sow (1935-2016). Statue de Victor Hugo (Besançon). Bronze. 2002.

Barthélémy, Toguo. Climbing Down (2004) : installation. Musée national de l’histoire de l’immigration.
Né au Cameroun en 1967, Barthélémy Toguo vit et travaille entre Paris, Düsseldorf et Bandjoun (Cameroun). Son travail interroge le statut de l’étranger, du migrant, de l’immigré, et sa difficulté à se constituer une identité.

Discographie

Abd al Malik. Scarifications. Laurent Garnier, 2015

MC Solaar. Qui sème le vent récolte le tempo. Polydor, 1991

MC Solaar. Cinquième As. Warner, 2001

Henri Salvador. L’essentiel Henri Salvador. EMI, 2002

Henri Salvador. Révérence, V2, 2005

Laurent Voulzy. La Septième Vague (album de reprises). Columbia, 2006

Laurent Voulzy ; Alain Souchon. Alain Souchon & Laurent Voulzy. Columbia, 2014

Laurent Voulzy. Belem. Columbia, 2017

 

 

Veille éditoriale

Récompenses

À l’occasion de la dernière Foire du livre de jeunesse de Bologne, les éditions la Joie de lire ont reçu Le Bologna Prize Best Children’s Publishers of the year. Cette maison d’édition suisse met en avant la créativité et la qualité du texte et de l’image. Si ses livres n’ont pas de fonction pédagogique, ils ont une grande valeur éducative. InterCDI, présente souvent les nouveautés de cet éditeur.

Jean-Claude Mourlevat a remporté le prix Alma (Astrid Lindgren Memorial Award), le Prix Nobel de la littérature jeunesse. Ce prix de 540 000 euros n’avait encore jamais récompensé un auteur français. Jean-Claude Mourlevat est un habitué des étagères de nos CDI depuis la parution de La Rivière à l’envers étudiée dans de nombreux collèges.

Joyeux anniversaires

La collection Tout en bd chez Casterman fête, cette année, ses 10 ans. Dès sa parution, L’Histoire de France en bd, écrite par Dominique Joly et dessinée par Bruno Heitz, connaît un grand succès. Au fil des années, cette collection s’ouvre sur des sujets de plus en plus diversifiés (mythologie, art, économie). 60 titres pour les collégiens.

Philip K. Dick est décédé, il y a 40 ans. À cette occasion, les éditions J’ai lu rééditent l’ensemble de ses romans dont Blade Runner, Le Bal des schizos et Ubik, son chef d’œuvre, proposé dans une nouvelle traduction. Quant aux nouvelles, elles sont parues dans la collection Quarto chez Gallimard.

Gallimard Jeunesse fête ses 50 ans. L’éditeur Pierre Marchand et l’illustrateur Jean-Ollivier Héron sont à l’initiative de la création de ce secteur de la célèbre maison d’édition. Les deux hommes vont révolutionner l’édition jeunesse en créant les collections : 1000 soleils, Folio junior et Découvertes Gallimard. Cet éditeur publie plus de 400 titres par an. Outre Harry Potter, Gallimard jeunesse peut compter sur d’autres long-sellers : À la croisée des mondes de Phillp Pullman (2,6 millions d’ex.), Le Clan des Otori de Lian Hearn (1,2 million d’ex.), Le Passe-Miroir de Christelle Dabos (1 million d’ex.).

Folio, toujours chez Gallimard, a également 50 ans. 3 000 auteurs de 81 nationalités différentes, parmi eux : 35 prix Nobel et 38 prix Goncourt. 9 400 titres publiés. 300 nouveautés par an. 468 millions d’exemplaires vendus depuis la création de la collection. Qui dit mieux ?

Féminisme et Documentaire jeunesse

Selon Livres hebdo, l’offre de documentaires jeunesse consacrés aux femmes a connu une forte progression : 50 titres ont été publiés en 2020 contre 28 en 2017, soit une hausse de 43 %. Entre 2017 et 2020, on note une augmentation totale de 44 %. Cet essor est très majoritairement porté par les biographies.

Bob Morane

Henri Vernes est décédé à 102 ans. Ancien résistant et membre du MI6 britannique, il publie en 1953, aux éditions Marabout, le premier tome des aventures de Bob Morane : La Vallée infernale. Durant quarante ans, il écrira 164 romans mettant en scène le célèbre aventurier et son compagnon Bill Ballantine, un Écossais amateur de whisky (un pléonasme ?). Bob Morane, lui n’est pas mort, les éditions Soleil publient, sur un scenario de Corbeyran et de Christophe Bec, une nouvelle aventure en bande dessinée : Les 100 démons de l’Ombre jaune. Tout un programme !

Mangas

Selon Les Echos, plus d’une bande dessinée sur deux vendues en France est un manga. On note une progression de ce marché de 120 %, sans doute boosté par le pass culture. Du coup, de nouvelles maisons d’édition ajoutent un secteur Manga à leur production. C’est le cas de Dupuis, avec Vega et de Michel Lafon avec Kazoku qui propose une adaptation de La Peste d’Albert Camus prévue en six tomes. Quant aux éditions Glénat, pionnières en ce secteur, elles ont fêté à Noël, le centième tome de One Piece. Banzaï !

Édition

Mauvaise nouvelle : après la mort de son fondateur en 2018 et le départ de son auteur vedette Joël Dicker, les éditions De Fallois ont mis la clef sous la porte en fin d’année dernière. Bonne nouvelle : les œuvres de Marcel Pagnol seront toujours éditées dans la collection « Fortunio » et vendues 6,50 euros. Les collègues de collège peuvent pousser un « ouf » de soulagement.

Dessin animé

Après une adaptation en roman jeunesse chez Rageot, la bande dessinée de Bruno Dequier Louca, éditée chez Dupuis, va connaître une version en dessin animé pour TFI. Cette série, très prisée des collégiens, raconte en neuf albums les aventures d’un lycéen paresseux et maladroit coaché par le fantôme d’un ancien élève, beau gosse, super doué au foot et très apprécié des filles. Chaque album se vend en moyenne à 500 000 exemplaires.

Librairies

Jeunes en librairie est un programme d’éducation culturelle en direction des collégiens, lycéens et apprentis, destiné à promouvoir l’accès au livre, à faire connaître le rôle du libraire dans la chaîne du livre et à encou­rager la fréquentation et l’achat de livres en librairie. Expérimenté en Nouvelle-Aquitaine et dans les Hauts-de-France, ce programme est étendu à d’autres régions. Un libraire se déplace dans la classe pour présenter aux élèves son métier et plus large­ment la chaîne du livre. Ensuite, les élèves se rendent dans la librairie partenaire pour une visite organisée avec le libraire. À cette occasion, les élèves ont la possibilité d’acquérir un ou plusieurs ouvrages à hauteur de 30 euros.

Pass culture

Selon Livre hebdo, les 3 livres les plus achetés avec le Pass Culture lycéen en 2021 sont 3 mangas : One Piece, Demon Slayer et L’Attaque des Titans. On trouve ensuite Burn after writing, entre le journal intime et les recettes de cuisine de développement personnel, 365 jours, sulfureux et assez nauséabond, adapté en série sur Netflix, La Chronique des Bridgerton, romans un peu « neuneu », en dentelles et crinolines, adaptés également en série. Netflix, la fabrique de lecteurs ! Heureusement le remarquable et remarqué Passe-Miroir de Christelle Dabos est également dans la liste. Ouf, l’honneur est sauf !

InterCDI à Amiens ?

La BnF a choisi la ville d’Amiens pour accueillir son pôle regroupant le Conservatoire national de la Presse et le centre de conservation pour ses collections. Ce conservatoire accueille plus de 3000 titres, allant de La Gazette (1641) de Théophraste Renaudot jusqu’à aujourd’hui. Il s’agit de construire des magasins dotés d’un système de conservation robotisé, des ateliers de restauration et de numérisation et enfin un espace de consultation. Le nouveau pôle devrait, en principe, ouvrir ses portes à l’horizon 2027-2028.

BnF encore

Capture de votre site web par la BnF. Si ce message apparaît sur votre ordinateur, c’est parce que les robots de la BnF scannent le web français pour en garder une trace dans le cadre du dépôt légal de l’internet. C’est le robot Heritrix qui est chargé de cette tâche. Dans une des tours du site François Mitterrand, sept employés gèrent les 45 milliards de page web produites depuis 1996. Big Brother is watching you…

Big Sister is watching you!

Sandra Newman, une jeune autrice, a été choisie par les ayants droit de George Orwell pour réécrire 1984 à travers le regard du personnage féminin de Julia. Dans le roman initial, quand Winston rencontre Julia, membre du commissariat aux romans et de la « Ligue anti-sexe des juniors », il la prend pour une agente de la police de la Pensée. Quand la jeune femme lui déclare sa flemme, Winston tombe follement amoureux. Ce qui ne l’empêchera pas, après son arrestation, de la trahir et de la renier. Pour connaître la version de Julia, il faudra attendre juin 2022, date de sa publication aux éditions Granta.

© Larry D. Moore, CC BY-SA 4.0

États-Unis

Les bibliothèques américaines connaissent une vague de censure inédite jusqu’alors. Des groupes partisans demandent à leurs membres d’assister aux réunions des conseils d’administration scolaires pour pointer du doigt certains livres. Leurs cibles sont généralement des ouvrages aux thématiques LGBTQIA et des livres sur l’histoire du racisme et de l’esclavage. Parmi les dix titres les plus censurés, on trouve : Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur d’Harper Lee ou Les raisins de la colère de John Steinbeck. God « blesse » America !

Vert

Après le CDI vert (InterCDI 292-293), c’est le monde de l’édition qui se met au vert. Le Syndicat National de l’Édition a publié une charte qui offre un guide des bonnes pratiques pour mettre en place des actions concrètes en faveur de l’environ­nement. Préférence à un imprimeur proche, papier certifié ou recyclé, choix des encres, tirage adapté pour éviter la mise au pilon, emballage optimisé, utilisation limitée des transports. Certains éditeurs anglo-saxons HarperCollins, Penguin Random House ou Bonnier Books veulent atteindre une neutralité carbone d’ici la fin de l’année en relocalisant leur production, en utilisant des énergies renouve­lables et en replantant des arbres. Le greenwashing est en marche.

 

 

Le dérèglement climatique et ses conséquences

Il ne fait désormais plus aucun doute que les changements climatiques sont bien réels et modifient peu à peu notre quotidien (changement des températures, disparitions d’espèces, apparition de nouvelles maladies…). À mesure que leurs effets s’intensifient, les jeunes prennent de plus en plus conscience que ce sont eux et leurs enfants qui en subiront les conséquences. De nouvelles angoisses apparaissent alors comme l’éco-anxiété, un mal qui touche particulièrement les jeunes générations. L’éco-anxiété est un sentiment d’impuissance face au changement climatique et à ses conséquences sur notre planète et plus particulièrement sur nos modes de vie. L’état du monde empire avec la hausse des températures, la montée des eaux, le déclin de la biodiversité, les ressources qui diminuent et l’augmentation des réfugiés climatiques… Si l’éco-anxiété peut provoquer le désespoir, la colère et la peur, elle peut également être source de mobilisation et donc d’action : il est encore temps, si on se dépêche, de changer le futur en permettant par exemple aux jeunes de s’informer sur ce qu’est véritablement le changement climatique et ses conséquences. Ainsi préparés et informés sur ces phénomènes et leurs implications, les jeunes pourront s’orienter vers des solutions, à leur échelle ou bien plus globales.
La littérature dédiée aux adolescents sur cette thématique et notamment les dystopies, les fictions d’anticipation connaissent un fort développement ces dernières années (voir Thèmalire « Dystopies et changements climatiques ») ; et la question du dérèglement climatique est souvent traitée par les médias. En revanche, les ouvrages documentaires récents qui portent sur cette question sont moins évidents à trouver.

Bien s’informer pour mieux comprendre le dérèglement climatique et ses conséquences. Introduction aux concepts

Pour comprendre ce que l’on vit aujourd’hui et ce qui nous arrivera demain, il est essentiel de revenir aux fondements en répondant à la question « Qu’est-ce que le changement climatique ? »
En effet, bien des jeunes ne savent pas véritablement de quoi l’on parle et ne font pas la différence entre le fait, par exemple, qu’il fasse plus chaud que d’habitude l’hiver (c’est-à-dire la météo) et un climat plus chaud qui entraîne des réactions en chaîne (le climat). Jean-Marc Jancovici, dans son ouvrage Le changement climatique expliqué à ma fille, reprend très clairement la différence entre ces deux éléments. Sous la forme d’une discussion entre un père et sa fille, il explique tout d’abord que le climat change, et revient sur des définitions importantes comme l’effet de serre. Il aborde également la thématique de la montée des eaux et des conséquences du réchauffement des océans, la fonte des glaciers et des banquises. Enfin, il rappelle que les ressources sont épuisables et bientôt épuisées, comme celles qui servent à produire notre énergie (pétrole, gaz, charbon, etc.). Il rappelle également que certaines énergies sont plus polluantes (et participent davantage au dérèglement) que d’autres.
Sur un autre support, la bande dessinée intitulée Le changement climatique en Bd ! réalisée par Yoram Bauman et Grady Klein met en scène deux scientifiques expliquant de manière simple et amusante ce qu’est le changement climatique. Dans une première partie, les auteurs reviennent sur le fonctionnement de notre planète pour mieux comprendre les cycles qu’elle a traversés et les différents phénomènes qui créent ce changement. La seconde partie dresse le portrait des conséquences de ce dérèglement depuis la révolution industrielle (l’augmentation des températures, ses conséquences sur l’eau et sur la vie sur Terre). La troisième partie porte sur les actions à mener pour limiter notre empreinte carbone. Le format bande dessinée est très intéressant, car il permet de toucher un public plus large et de faciliter la compréhension des termes employés grâce à de nombreux schémas, graphes et dessins.
Ancien et peut être difficile à trouver, le documentaire d’Al Gore Une vérité qui dérange, à la fois biographique et de photographie, invite à une prise de conscience générale sur les problèmes environnementaux. Nous sommes touchés par cet ancien vice-président des États-Unis qui nous raconte comment il a pris lui-même conscience du changement climatique à la suite du terrible accident de son fils. Le dérèglement climatique et ses conséquences (fonte des glaciers, augmentation des catastrophes naturelles, manque d’eau, élévation du niveau de la mer) sont autant de preuves que celui-ci est déjà présent et qu’il s’intensifie. Il apporte également des éléments de compréhension sur l’inaction des États (actions de lobbyistes et campagnes de pub discréditant les scientifiques). Enfin, Al Gore propose des moyens d’actions individuels pour limiter la consommation d’énergie et ainsi avoir moins d’impact sur le climat.

Un changement climatique qui implique des changements sociétaux

Pour faire suite à la critique d’Al Gore sur les raisons de l’inaction politique face à l’urgence climatique, plusieurs documentaires pointent du doigt le capitalisme, le rôle joué par les lobbys et la surconsommation.
Ainsi, la blogueuse Emma Clit, dans la bande dessinée intitulée Un autre regard sur le climat, met en évidence une approche sociale du problème. Elle dresse le portrait, appuyé de chiffres, des conséquences des changements climatiques sur les territoires et sur les populations. C’est un livre engagé et foncièrement anticapitaliste, le capitalisme étant jugé comme la première cause du dérèglement climatique et de l’inaction politique : le profit, le lobbying et l’illusion d’une économie verte sont autant de maux qui empêchent les véritables actions. La dernière partie de ce livre est dédiée aux solutions possibles que nous pouvons déjà mettre en place.
Sur le sujet du capitalisme et la critique de notre mode de consommation actuel, nous pouvons également recommander l’album de Cyril Dion et Pierre Rabhi, Demain entre tes mains. Cet album est facile d’accès pour les élèves car il contient peu de texte au profit d’images avec de nombreuses citations mises en avant comme des principes écologiques et de vie en société. Il explicite les problèmes liés au changement climatique comme la déforestation, l’extinction de nombreuses espèces et l’augmentation de la pollution. Cyril Dion et Pierre Rabhi critiquent notamment dans ce livre le fait que l’on utilise la nature et ses ressources, non plus seulement pour se nourrir ou pour vivre, mais au contraire pour s’enrichir et faire du capital. Ils prônent un changement de comportement basé, non plus sur la peur de manquer, mais sur d’autres types de valeurs comme la passion ou l’amour.

Des Bds documentaires pour toucher un public plus large

Trois bandes dessinées peuvent permettre d’aller plus loin dans la compréhension des enjeux climatiques actuels. Il s’agit de Saison brune de Philippe Squarzoni (2012), Le monde sans fin de Christophe Blain et Jean-Marc Jancovici (2021) et Urgence climatique : il est encore temps ! d’Ekeland Ivar et Lécroart Etienne (2021).
Saison brune (Prix de l’Académie française 2012) met en scène Philippe Squarzoni lui-même qui termine son album politique Dol. Toutefois, il lui reste un chapitre sur l’écologie à écrire et à dessiner. Manquant de connaissance sur le sujet pour réaliser correctement son album, il commence à chercher des informations, mais les problèmes du changement climatique lui apparaissent plus compliqués que ce qu’il pensait. Il mène alors une véritable enquête pour mieux comprendre ces enjeux. Nous sommes plongés à la fois dans une enquête pour comprendre les causes et les conséquences du dérèglement climatique, mais aussi dans les considérations et les craintes personnelles de Philippe Squarzoni telles qu’elles pourraient l’être pour chacun de nous.
Le monde sans fin est une bande dessinée d’une approche plus ludique, dans laquelle Christophe Blain, le dessinateur (dessinateur de la BD Quai d’Orsay, 2010), se met en scène, discutant avec Jean-Marc Jancovici. Cette BD est composée de trois grandes parties : l’énergie, le climat, la culpabilité. La première partie sur l’énergie nous fait réaliser que tout ce que nous utilisons dans notre quotidien, nos appareils électroniques, bien sûr, mais aussi tous nos objets, consomment ou ont consommé de l’énergie avant d’arriver jusqu’à nous. Nous apprenons ainsi ce qu’est l’énergie et la place centrale qu’elle occupe au sein de la société. La seconde partie concerne le climat et notamment les causes et conséquences du dérèglement climatique. Jean-Marc Jancovici explique que les humains agissent sur trois des gaz à effet de serre qui participent à ce dérèglement. Il revient ensuite sur les conséquences d’une augmentation de 2 à 5 degrés, non seulement pour la planète (les océans, la biodiversité, etc.), mais aussi pour les populations. Il fait également une comparaison très intéressante des différents moyens de fabriquer de l’énergie. La troisième partie n’est pas là pour culpabiliser le lecteur (contrairement à son titre ironique). Au contraire, Jean-Marc Jancovici nous rassure : il n’est pas question d’arrêter de manger de la viande, mais de changer nos manières de consommer : par exemple, consommer moins, mais de meilleure qualité et de manière locale, changer nos habitudes de transport, modifier notre manière de construire nos logements et enfin faire des achats raisonnés.
Urgence climatique : il est encore temps ! est issu de la rencontre d’Ekeland Ivar (mathématicien) et Lécroart Étienne (dessinateur). La BD a pour objectif de sensibiliser le lecteur à la question de l’urgence climatique, un sujet sérieux, certes, mais sans toutefois mettre de côté l’humour d’Étienne Lécroart. Grâce aux nombreuses interventions d’experts scientifiques, biologistes, historiens, économistes et climatologues, cette BD permet de faire l’état de la situation actuelle concernant le dérèglement climatique. Si le tableau du futur que dépeignent ces témoignages n’est pas très réjouissant, les auteurs parviennent à montrer qu’il est encore possible d’agir en vue de l’améliorer, si toutefois nous nous en donnons les moyens.

La mobilisation des jeunes

Face au constat de l’urgence climatique, ce sont les jeunes qui se mobilisent et qui montrent du doigt l’inaction générale. Ces jeunes ont pris conscience des problèmes climatiques et écologiques qui nous entourent et désirent un changement de politique, avec plus de justice sociale.
On peut le voir notamment à travers le roman Il est encore temps ! de Jean-Philippe Blondel qui met en scène une jeune lycéenne, Lou, qui entre en seconde et qui n’est pas aussi excitée que les autres par la rentrée. Lou est très sensible aux conséquences du changement climatique et ne voit pas comment elle pourrait se projeter dans un futur qui serait dégradé. Pourquoi étudier si nous ne savons pas si nous survivrons dans dix ans ? Lou va découvrir Greta Thunberg et partager sa lutte jusqu’à organiser elle-même un événement d’envergure avec l’aide de ses nouveaux amis. Ce roman fait écho à l’éco-anxiété des jeunes face aux problématiques environnementales et climatiques dont ils vont être victimes et démontre qu’ils peuvent aussi être les moteurs du changement. De plus, il est assez court et dynamique, il donne envie de se documenter davantage sur ces jeunes qui luttent et essaient d’agir pour le futur.
Pour aller plus loin, nous pouvons conseiller Polar vert. L’histoire se passe en Bretagne, Klervi, une jeune lycéenne, retrouve son frère et son cheval inertes sur une des plages proches de chez eux. Elle court les sauver, sachant pertinemment que la plage est recouverte d’algues vertes et que celles-ci peuvent tuer. Elle s’évanouit et est secourue in extremis. Toutefois, le monde de Klervi sera à jamais chamboulé : son frère est dans le coma, son cheval est mort, elle devient à la fois un témoin important dans l’enquête policière en cours au sujet de l’accident de son frère et aussi un suspect dans le trafic d’espèces protégées que mène la famille de son petit ami. Les deux jeunes gens et leurs amis deviennent des activistes critiquant l’implication des grandes industries dans la prolifération des algues vertes et l’inaction des politiques face à l’urgence climatique.
Un excellent documentaire peut également être révélateur de l’engagement des jeunes pour le climat et l’environnement. Il s’agit de Ces jeunes qui changent le monde. Cet ouvrage ne se limite pas à la question du climat, mais traite aussi de la thématique des déchets, du plastique, de la déforestation, de la biodiversité, de l’éducation, etc. Chaque thématique est un focus sur l’adolescent qui lutte pour faire changer les choses. Plusieurs pages sont donc consacrées au climat, à Greta Thunberg, mais aussi à Anuna De Wever et Kyra Gantois, et Xiuhtezcatl Martinez. Les auteurs nous décrivent leur combat, comment l’idée de cette lutte leur est venue et ce qu’ils ont fait pour montrer leur désaccord. Ils font également un portrait de ces jeunes. Enfin ils retracent les dates clefs du mouvement « Grève de l’école pour le climat ». Ce livre invite les jeunes à prendre conscience qu’ils ont un pouvoir politique, qu’ils peuvent entrer en action et faire entendre leur voix.
Pour finir, nous pouvons également faire référence à l’ouvrage de Mazza Viviana (journaliste italienne), Greta La voix d’une génération, dans lequel Viviana Mazza dresse le portrait de Greta Thunberg et raconte ses actions pour l’environnement et le climat. L’auteure fait également référence au fait que le mouvement lancé par Greta Thunberg est suivi par de nombreux jeunes et qu’il n’est pas un élément isolé. C’est un ouvrage court, facile à lire et peuplé d’illustrations. Un dossier pédagogique et un glossaire à la fin du livre reprennent les définitions les plus importantes.

Conclusion

L’impact de l’activité humaine sur le climat n’est plus à démontrer, et ses conséquences sur le futur de nos sociétés s’annoncent désastreuses : nous sommes en situation d’urgence climatique. Il apparaît clairement qu’il faut agir vite et dès maintenant. Or, c’est cet état d’urgence et cette prise de conscience qui sont source d’anxiété et de fatalisme : pourquoi continuer à étudier ? Le CDI (Centre de Documentation et d’Information) paraît être le lieu idéal pour permettre aux jeunes de s’informer, avec des ressources actuelles et fiables. Être informé et comprendre ce que signifie ce dérèglement permettra aux jeunes d’anticiper sur leur avenir, de réfléchir à leurs actions, de développer leurs compétences en fonction de la ou des causes pour lesquelles ils souhaiteraient s’investir personnellement et enfin de participer à trouver des solutions.

 

 

Éthique des algorithmes, quelle sensibilisation pour les élèves ?

« Gouvernementalité algorithmique »

La question de l’algorithme revient, in fine, à des questions relatives à la prise de décision et donc à la gouvernance. Rouvroy & Bern (2013, p. 165) évoquent même le concept de « gouvernementalité algorithmique » en tant que « nouveau régime de vérité numérique [qui] s’incarne dans une multitude de nouveaux systèmes automatiques de modélisation du “social”, à la fois à distance et en temps réel, accentuant la contextualisation et la personnalisation automatique des interactions sécuritaires, sanitaires, administratives, commerciales ». Ainsi, dans les cas cités précédemment, de plus en plus, la décision est prise directement par un algorithme. Nous retrouvons alors une partie de la pensée cybernétique (Delpech, 1972), dont l’étymologie même vient de Kybernete qui signifie « gouverner » en grec, et dans une perspective du passage de la réglementation à la régulation (Supiot, 2005). Ce changement conduit à favoriser le maintien à l’équilibre d’un système (avec une action interne) plutôt qu’une intervention externe sur le système. Si cette approche semble plus rapide et performante (comme l’illustrent les smart contracts sur Ethereum3), elle peut favoriser l’autorégulation en phase avec le capitalisme de plateforme où la donnée est considérée comme le « pétrole » du xxie (avec tous les problèmes associés évoqués par O’neil (2018)).

Il nous semble alors fondamental de questionner la dimension éthique des algorithmes, notre contribution à ce numéro de la revue InterCDI se propose d’apporter quelques éléments théoriques et de réflexion sur la manière dont les professeurs documentalistes peuvent intégrer ce questionnement autour des algorithmes, de l’éthique des algorithmes aux pratiques scolaires et contribuer à la culture informationnelle et numérique de leurs élèves. Il nous semble envisageable d’inscrire ce travail dans le cadre du programme de sciences numériques et technologie de seconde et le programme de numérique et sciences informatiques de la première et terminale.

Éthique et loyauté des algorithmes

Cette question de gouvernance et de prise de décision nous conduit à évoquer la dimension éthique des algorithmes. En effet, ceux-ci doivent prendre des décisions qui affecteront leurs utilisateurs. Comme le rappelle Jean-Gabriel Ganascia, l’éthique vient de « ήθος en grec qui signifie mœurs, coutumes, habitudes » (Ganascia, 2021). D’après lui, l’éthique associée au numérique, et in extenso aux algorithmes, est liée pour partie à la rationalité et à la volonté. Le problème éthique se situe alors sur les interactions êtres humains-machines. En effet, Ganascia note que les interactions humain-machine « doivent aider les humains à soumettre les machines à leurs désirs en évitant qu’elles ne les piègent, voire que certains les utilisent pour les piéger » (ibid.). Face à cela, plusieurs risques liés à l’interaction humain-machine se dessinent :
– Pratiques trompeuses (ex. : spam et autres arnaques en ligne) ;
– Réponse qui modifie le comportement de l’humain (ex. : tentative de manipulation des comportements/opinions d’internautes comme dans le cas du scandale Cambridge Analytica) ;
– Transmission de données personnelles à des tiers (ex. : transmission de données médicales de Doctolib vers des tiers en Allemagne) ;
– Cyber-harcèlement (ex. : diffamation, diffusion d’informations personnelles4).

Comment rester libres et responsables de nos actes ? Les acteurs du numérique gagnent en pouvoir et peuvent prendre des décisions importantes. Ainsi, Facebook ou Twitter se sont arrogés le droit de censurer des contenus qui enfreindraient leurs conditions générales d’utilisation et cela automatiquement, sans aucun autre pouvoir juridique que leurs actionnaires.
Cadrer la question éthique par rapport aux algorithmes, et plus largement au numérique, est aussi complexe du fait de « l’impossibilité à anticiper toutes les applications que l’on peut faire d’une technologie et à décider a priori de ce qui est problématique » (Ganascia, 2021).

Avec ces questionnements éthiques, nous pouvons faire le lien avec les trois lois générales de la robotique formulées en 1942 par Isaac Asimov (auteur notamment d’ouvrages de science-fiction) :
« 1. loi numéro 1 : un robot ne peut porter atteinte à un être humain ni, restant passif, permettre qu’un être humain soit exposé au danger ;
2. loi numéro 2 : un robot doit obéir aux ordres que lui donne un être humain, sauf si de tels ordres entrent en conflit avec la première loi ;
3. loi numéro 3 : un robot doit protéger son existence tant que cette protection n’entre pas en conflit avec la première ou la deuxième loi »5.

Cette première réponse, issue de la science-fiction, est intéressante, mais n’est pas encore implémentable en tant que telle dans les dispositifs informatiques et ne répond pas au problème éthique évoqué. De plus, elle ne tient pas compte des spécificités de notre époque, en particulier le poids des GAFAM et de l’utilisation des données à caractère personnel (Zuboff, 2020) qui est faite. Ainsi se pose la question de la loyauté, en particulier de la loyauté des plateformes. L’Association Francophone des Utilisateurs de Logiciels Libres (AFUL) définit comme loyaux les services qui permettent :
« – à leurs utilisateurs de disposer, dans un format ouvert, de l’intégralité de leurs données ainsi que des données et informations liées nécessaires pour l’exploitation de ces données par un autre fournisseur de service en ligne ;
– à leurs utilisateurs de disposer sous licence libre de tous les logiciels nécessaires pour mettre en œuvre le service en ligne afin de pouvoir bénéficier du même service sur une infrastructure autonome ou exploitée par une tierce partie ;
– à un concurrent potentiel de proposer un service comparable, excluant tout verrouillage juridique empêchant la possibilité d’offrir le même service ;
– un usage du service par tous, partout, et sans discrimination aucune vis-à-vis d’un groupe ou d’une personne ;
– à leurs utilisateurs la garantie du secret absolu et la protection de leurs données, y compris sous forme anonymisée. La fourniture à un tiers de données relatives à l’usage du service ne peut se faire sans un accord préalable explicite de l’utilisateur, au cas par cas. »

Actuellement, en France, la loi pour une République Numérique impose principalement une obligation renforcée d’information à l’égard du consommateur6, une mesure qui semble dérisoire eu égard aux enjeux et aux pratiques des acteurs en présence. Pourtant s’assurer de la loyauté des plateformes et autres algorithmes revient à s’inscrire dans une démarche éthique en interdisant le détournement de certaines données à caractère personnel pour des usages commerciaux ou publicitaires.

Sensibiliser sur la question de l’éthique des algorithmes

Avec la mise en place du cadre institutionnel Digital Competence Framework for citizens (DigComp), transposé en France dans le cadre de Pix (cf. numéro InterCDI 291), intégrer la question des algorithmes, et plus particulièrement de l’éthique des algorithmes, nous semble essentiel pour contribuer à la culture numérique et informationnelle des élèves. En effet, l’algorithme est le soubassement des outils du numérique ; expliciter les enjeux et le fonctionnement des algorithmes (comme ceux à l’œuvre dans la mise en place de bulle de filtres7 pour les cours d’éducation aux médias et à l’information) est alors concomitant avec les objectifs affichés.
Si les élèves utilisent au quotidien de nombreux algorithmes, ils sont peu à se rendre compte de leurs influences sur leurs comportements. Comment favoriser leur prise de conscience ?
Des initiatives intéressantes se développent pour illustrer concrètement les comportements des algorithmes. Ainsi, Rodrigo Ochigame (du Massachusetts Institute of Technology) et Katherine Ye (Carnegie Mellon University) dans leur projet Search Atlas (Ochigame & Ye, 2021) souhaitent contribuer à la « visualisation des résultats de recherche divergents à travers les frontières géopolitiques ». L’outil n’est pour l’instant pas accessible au grand public, toutefois un accès est possible en formulant une demande auprès de l’équipe de recherche.
La figure 1 illustre l’interface de l’outil développé par Ochigame et Ye. Dans cet exemple, le concept recherché — god (« dieu » en anglais) — est en haut à gauche. Il est traduit automatiquement en japonais et en arabe pour permettre d’afficher des résultats dans d’autres langues et contextes culturels qu’anglo-saxon.

Trois colonnes présentent les résultats. Dans le premier cas, les résultats de la recherche sur le concept « dieu » en japonais renvoient vers l’acceptation shinto8 du terme. Au contraire, dans les résultats en arabe, « dieu » renvoie vers Allah et l’Islam. Enfin, dans les résultats anglo-saxons, c’est le christianisme qui ressort dans les résultats des moteurs de recherche. Cet outil contribue à matérialiser les biais présents dans l’algorithme de Google.

Figure 1 : comparaison des résultats pour la recherche « god » en japonais, arabe et anglais, source : Ochigame & Ye (2021)

En effet, la même requête sur Google renvoie donc des résultats contextualisés en fonction de l’utilisateur, de sa langue, et dans son environnement culturel comme les auteurs le soulignent avec la figure 2.

Figure 2 : éléments constitutifs d’un algorithme, des influences sont possibles sur les résultats à toutes les étapes, source : Ochigame & Ye (2021)

Les résultats d’une même recherche sont alors loin d’être objectifs. En effet, comme le souligne Schmitt (2016) « un algorithme est le résultat de la formalisation d’une procédure qui, une fois implémentée dans un programme informatique, peut alors être rejouée indéfiniment sans intervention (Sandvig, Hamilton, Karahalios et Lanfbort, 2015). Cette reproductibilité laisse à penser qu’un algorithme est un processus mécanique, nécessaire ou autonome qui ne laisserait aucune place à un certain degré de contingence et de jugement individuel ». Contrairement aux prétentions de certains de leurs thuriféraires, un algorithme et son résultat sont fortement influencés par ses concepteurs.

Un travail réflexif peut être mené avec les élèves pour les guider dans la compréhension et l’analyse du fonctionnement des dits algorithmes et des résultats. Complémentaire à cet exemple qui illustre les différentes réponses en fonction de l’environnement culturel ou de la langue, un autre travail peut être réalisé avec les élèves dans le cadre de l’EMI pour qu’ils comprennent les mécanismes mis en place par des acteurs comme YouTube ou TikTok dans le cas des recommandations de vidéos ou plus généralement sur des recommandations de contenus.
En effet, le cas de YouTube est symptomatique. De plus en plus utilisé pour s’informer, le site diffuse de nombreux documentaires et reportages9 qui demandent aux internautes de savoir analyser l’information et prendre un recul critique dessus. Concernant spécifiquement YouTube, en avril 2019, le média Bloomberg10 publie une enquête sur la politique de filtrage du site où l’auteur souligne les choix faits pour favoriser l’engagement sur le site. Se pose alors la problématique éthique liée aux recommandations qui sont faites sur la plateforme, alors même qu’il est fortement utilisé par de nombreux jeunes utilisateurs. Deux exercices complémentaires sont alors envisageables pour sensibiliser les élèves à ces questions.
– Dans un premier temps, mettre en place un carnet de bord des vidéos visionnées (y compris les éléments auxquels nous avons accès comme le nom de la vidéo, l’auteur, sa date de publication, sa durée, le nombre de commentaires, le nombre de vues et de « j’aime » ainsi que sa description) et les suggestions associées à chaque vidéo. Les élèves pourraient ainsi observer sur une période déterminée l’évolution des recommandations sur YouTube11. Ce travail d’observation pourrait être renforcé aussi par la comparaison des suggestions sur YouTube lorsque l’élève est connecté à son compte Gmail et lorsqu’il n’est pas connecté. Nous retrouverons ainsi quelques facteurs sur lesquels s’appuient YouTube aujourd’hui pour recommander des vidéos : contenus que les internautes consultent (vs ceux sur lesquels ils ne cliquent pas), le temps des vidéos visionnées, la popularité (notamment la hausse rapide du nombre de vues), le degré de fraicheur de la vidéo, l’engagement des internautes. Ils pourront alors prendre conscience de la manière dont le site les oriente afin qu’ils restent captifs. C’est aussi une manière d’illustrer concrètement cette économie de l’attention (Citton, 2014).

– Dans un deuxième temps, pour compléter la compréhension du fonctionnement des algorithmes, en particulier ceux utilisés par les GAFAM, il peut être intéressant d’explorer le fonctionnement des réseaux de graphes et de la théorie associée : la théorie des graphes12. En effet, de nombreux sites s’appuient sur des bases de données dites « base de données graphe » pour développer leurs algorithmes et proposer des résultats plus « pertinents » pour l’utilisateur. Il est possible de tester, directement et sans connaissance technique, la base Neo4j depuis un navigateur web depuis : https://sandbox.neo4j.com/. En expérimentant avec Neo4j, nous pouvons matérialiser l’application de la théorie des graphes aux espaces en ligne afin de mieux comprendre de quelle manière les acteurs du numérique structurent la donnée et utilisent ces données structurées pour optimiser les suggestions. Pour travailler spécifiquement sur les suggestions, Neo4j propose directement un jeu de données dédié à la recommandation de films. Voici un exemple de la visualisation qui est offerte par la base de données :

Figure 3 : Illustration du fonctionnement de la base Neo4j pour recommander des films, source : neo4j.com

Sur ce cas sont présentes les évaluations de deux internautes. En fonction des votes de Guy ou de Betty (représentés par les points violets), des recommandations de films (points bleus) pourront être faites pour mettre en avant de nouveaux films à visionner lors d’une prochaine connexion. Ainsi, si Betty et Guy regardent les mêmes films (Dances with Wolves, Pretty Woman, etc.) et mettent des évaluations similaires, il est probable qu’un film apprécié par Betty, comme True Romance, pourrait plaire à Guy (et réciproquement). Le système de recommandation automatique devrait alors suggérer à Guy de regarder le film True Romance lors d’une prochaine connexion. Ce système a pour vocation de maintenir captifs au maximum les internautes, car comme l’indiquait Reed Hastings, PDG de la société Netflix, leur seul réel concurrent est le sommeil.

Conclusion

Dans un monde de plus en plus binaire, qui laisse aussi place à moins de nuances, la question de l’éthique des algorithmes renvoie aussi à la question de la formation de citoyens éclairés qui sont à même de comprendre les décisions prises par des algorithmes afin de mettre en place une action corrective si besoin est (i.e. : privilégier des services loyaux et/ou le logiciel libre, autoriser/refuser l’accès à ses données sur des réseaux sociaux numériques comme Facebook pour réguler l’utilisation de ses données à caractère personnel par des tiers, etc.). En effet, l’effectivité du droit à l’opposabilité13 doit permettre à la fois au citoyen de disposer de voies de recours pour obtenir la mise en œuvre effective de son droit et contraindre la puissance publique à une obligation de résultat. Toutefois, comprendre le fonctionnement d’un algorithme demande une littéracie certaine (ex. : capacité à lire du code et à comprendre ce qu’un algorithme fait) qui doit nécessairement compléter les appels à la transparence des algorithmes. Celle-ci est remise en cause par la généralisation d’algorithmes qualifiés de « boîtes noires », en lien avec la mise en place d’algorithmes d’apprentissage profond (comme les réseaux de neurones). Ces algorithmes perdent en intelligibilité pour l’être humain et complexifient particulièrement le travail de rétro-ingénierie pour comprendre le fonctionnement des algorithmes ou pour auditer les comportements des acteurs du numérique.

 

Veille numérique 2022 N°1

éducation

50 ans : le livre numérique

Le livre numérique s’est démocratisé avec les liseuses dans les années 2000, mais si on retrace son histoire, le premier texte électronique The United States Declaration of Independence remonte à 1971. Deux formats vont participer à l’essor de l’ebook, tout d’abord le PDF d’Adobe, à partir de 1993, puis l’EPUB en 2005.
À lire en ligne Une courte histoire de l’ebook par Marie Lebert :
https://archive.org/details/histoire-ebook/mode/2up
Exposition en ligne “Une courte histoire de l’ebook, en 20 dessins” par Denis Renard :
https://actualitte.com/article/102064/usages-numeriques/une-courte-histoire-de-l-ebook-en-20-dessins

S’informer sur la sexualité : Onsexprime

Créé par Santé publique France, le site Onsexprime s’adresse à la jeunesse (collégiens, lycéens et étudiants). Les ressources pédagogiques répondent aux nombreuses questions que peuvent se poser les adolescents et les plus grands sur la sexualité. Les documents, sous la forme de textes, illustrations et vidéos, sont organisés en rubriques et sont adaptés pour des séances dans le cadre de l’éducation à la sexualité.
https://www.onsexprime.fr/

Bibliothèque numérique des Ponts et Chaussées

L’École des Ponts ParisTech inaugure sa nouvelle bibliothèque numérique : L’Héritage des ponts et chaussées. Afin de valoriser les contenus de sa collection, elle rejoint la communauté Gallica de la BnF. La bibliothèque de la plus ancienne école d’ingénieurs française rassemble plus de 15 000 documents à destination des élèves, professeurs, professionnels et amateurs.
https://heritage.ecoledesponts.fr/enpc/

Lecture numérique

L’univers de DC chez Webtoon

La maison d’édition américaine DC comics a mis en place un partenariat avec la plateforme Webtoon (site américano-sud-coréen) qui diffuse des BD du monde entier (principalement des mangas). Cette nouvelle collaboration permet d’élargir l’offre de bandes dessinées à tous les fans de super-héros tels que Batman, Superman ou Wonder Woman.
Batman sur la plateforme Webtoon :
https://www.webtoons.com/fr/slice-of-life/batman-wayne-family-adventures/list?title_no=3585

Twittérature pour Emma Bovary en 2021

Pour le 200 anniversaire de la naissance de Flaubert, l’association Baraques Walden lance le projet Bowary. Dix auteurs (Maylis de Kerangal, Fred Duval, Agnès Maupré…) ont relevé le défi de réduire Madame Bovary en 280 tweets. Selon son concepteur, Stéphane Nappez, Bowary n’est pas un “résumé” mais une “réduction” de Madame Bovary. ». Ou une performance !
https://twitter.com/BaraquesW

Insolite

Listes de courses sur Insta puis dans un livre !

Un Italien publie depuis plusieurs années ses listes de courses sur une page d’Instagram, la lista della spesa. Cette page insta est aussi alimentée par les listes envoyées par les followers. Ces listes illustrées et un peu froissées racontent des histoires qui font la part belle à l’imaginaire. Un livre vient d’être publié, et compile 150 listes de courses, Prosecco, pannolini e pappa per il gatto. Avis aux italophones !
https://www.instagram.com/insta_della_spesa/?hl=fr

Médias

Le Gorafi racheté par DC company

Le site satirique a été racheté par une société d’investissement spécialisée dans le numérique et les médias, DC company. L’un des fondateurs du Gorafi, Pablo Mira, rejoindra cette entreprise. Selon le dirigeant de cette société, le modèle économique du Gorafi va évoluer notamment avec des contenus satiriques promotionnels et l’utilisation de financements participatifs.

Facebook news et les droits voisins

Facebook lance en France, début 2022, son nouveau service d’information, le Facebook News. À la suite des accords-cadres avec Le Monde, le Figaro et l’APIG (Alliance de la presse d’information générale), Facebook va rémunérer la presse au titre des « droits voisins ». Ces mêmes mesures avaient été prises auparavant avec Google. Ces accords ont été possibles grâce à la législation européenne adoptée en 2019 qui impose la rémunération des auteurs dont les contenus publiés dans la presse sont relayés sur les grandes plateformes du Web.

écologie

Dérèglements climatiques : Ce climat n’existe pas

Des chercheurs québécois ont développé un outil basé sur l’intelligence artificielle, afin de visualiser les dégâts possibles du dérèglement climatique sur les lieux d’habitation. Accessible sur le site “Ce climat n’existe pas”, il suffit d’indiquer une adresse puis de choisir un scénario (inondation, chaleur intense, brouillard toxique). L’application simule visuellement les effets à l’aide du support Google Street View.
https://ceclimatnexistepas.com/home

Un cloud dans de l’ADN végétale !

Le rapport de 2020 de la société de recherche Gartner confirme la possibilité de stocker les données dans de l’ADN. En 2012, des scientifiques de la Harvard Medical School avaient codé un livre dans de l’acide désoxyribonucléique, dit ADN. En 2018, deux designers férus de biologie ont transformé une boutique de fleurs à Copenhague en un espace de données.
À priori, selon les scientifiques, pas de conséquences néfastes sur les plantes. Et pourquoi pas une forêt comme Data center !

Notre planète, notre avenir

La commission européenne héberge le site Notre planète, notre avenir dont l’objectif et le slogan sont de “lutter ensemble contre le réchauffement climatique”. La plateforme est composée de quatre entrées (causes, impacts, solutions, étapes) avec des contenus, des activités, des ressources et un espace pour les enseignants. Une boîte à outils est disponible dans la rubrique “Sujet” (une courte vidéo présentant l’outil, 5 stories pour Instagram et Facebook, des affiches, un guide d’utilisation et des consignes pour le copyright).
https://ec.europa.eu/clima/sites/youth/node_fr

Droit et données personnelles

Reconnaissance faciale en continu

La dernière puce haut de gamme pour smartphones, de l’entreprise américaine Qualcomm, sera dotée d’une fonction de détection faciale en continu. L’objectif affiché de la firme est de faciliter le déverrouillage du téléphone par les utilisateurs. Ce système utilise l’appareil photo frontal et non pas un mécanisme dédié. Le constructeur assure que la caméra n’enregistre pas d’image(s) et recherche uniquement des visages. Néanmoins, une caméra frontale allumée en permanence pose question sur le droit à la vie privée et les dérives possibles concernant la collecte de données.

Les données de santé des Français aux USA

Après Doctolib chez Amazon, c’est au tour des données nationales de santé (Health Data Hub) d’être hébergées chez Microsoft. Cet hébergement et exploitation du HDH par la structure américaine Azure (cloud de Microsoft), sans réel appel d’offre, pose de multiples problèmes tels que la protection des données personnelles, la sécurité juridique et le conflit d’intérêt. La CNIL, l’ANSSI, la CNAM et Anticor, entre autres, avaient alerté sur ces difficultés dont la plus importante est que ces sociétés États-Uniennes, bien que soumises au RGPD, soient régies par le droit américain, ce qui implique que les autorités ont un droit d’accès aux données. Le gouvernement français s’est engagé à rapatrier le Health Data Hub sur le sol européen d’ici deux ans…

Géant du web

Facebook mue en Meta

Facebook veut changer son image écornée depuis quelques années à la suite de nombreuses affaires dont la dernière en date, le «Facebook files». Meta, le nouveau nom de la firme, vient de Metaverse, c’est-à-dire le monde virtuel sur lequel Mark Zuckerberg fonde beaucoup d’espoir. En dehors des réseaux sociaux, tous les produits vont changer de nom, par exemple, la tablette “Tout en un” ultra connectée Facebook portal va devenir Meta portal.

Technologie

UE : Chargeur unique pour les smartphones

L’Union européenne a proposé un projet de loi visant à imposer un connecteur et un chargeur universel pour les smartphones, les tablettes, les appareils photos et autres appareils nomades. L’UE a retenu le connecteur USB Type-C et le chargeur USB Power Delivery. Les constructeurs devront, une fois la loi adoptée, se mettre en conformité dans un délai de 24 mois.

SOS vidéo sur les smartphones Google

Les téléphones Pixel de Google possèdent une fonction SOS capable de vous localiser, d’enregistrer une vidéo et de l’envoyer à un contact en cas d’urgence. Pour activer cette application de sécurité personnelle, il suffit d’appuyer cinq fois de suite sur le bouton d’allumage du smartphone. La vidéo dure 45 minutes maximum et le téléphone doit être connecté à internet pour que celle-ci soit automatiquement sauvegardée sur le cloud.

Data center nouvelle génération

Les data centers sont souvent montrés du doigt car énergivores. Les nouvelles structures n’utilisent plus la climatisation et acceptent une température un peu plus élevée car les éléments sont conçus pour supporter des températures de 30° C. Ces data centers utilisent principalement la ventilation, et lorsqu’il fait très chaud, une technique d’évaporation/ruissellement refroidit l’ensemble. Ex : DC5 de Scaleway (filiale de Free) à Saint-Ouen-l’Aumône.

No future…

La Chine investit les réseaux sociaux

Un récent rapport de l’IRSEM (Institut de recherches du ministère des Armées) épingle la Chine qui tente d’étendre son influence sur les réseaux sociaux en utilisant différentes méthodes agressives : fermes à troll (publication à la chaîne d’articles pour occuper l’espace), opérations de doxing (publications d’informations personnelles d’une personne afin de nuire), créations de faux comptes par une IA (publications orientées et automatisées), loups guerriers (création de comptes anonymes pour faire pression, voire menacer).
http://www.lien.fr

Les métavers, le retour !

Facebook, Alibaba et Tencent investissent énormément dans la création d’un univers virtuel. Nous avions connu “Deuxième monde” en 1997 puis “Second Life” en 2003. Les casques de réalité virtuelle, les cryptomonnaies et un accès au haut débit pour 90 % de la population européenne et américaine constituent de nouvelles données qui semblent avoir convaincu les géants du web de se lancer dans la création du metaverse de demain, probablement très rentable économiquement.

Cybercasses de Bitcoin

Les plateformes de cryptomonnaies sont de plus en plus attaquées. Les trois plus importants casses de l’année représentent, en équivalent dollar : PolyNetwork (600 millions $), Cream Finance (130 millions $), BadgerDAO (120 millions $). Les coffres de bitcoins ont l’air plus vulnérables et bien plus lucratifs à percer que ceux des banques traditionnelles !

 

 

Appel à contributions : 50 ans d’Intercdi, retour vers le futur

Dans le numéro spécial 299-300 nous fêterons le cinquantième anniversaire d’InterCDI.

À cette occasion, l’équipe de la rédaction tient tout d’abord à vous remercier de votre fidélité et revient vers vous pour solliciter vos témoignages sur le lien particulier qui vous unit à InterCDI. Faites-nous part de ce qui vous a marqué dans la vie de la revue, de votre participation à cette aventure associative, de ce qui vous a été utile dans le cadre de votre pratique professionnelle, mais également de vos souhaits pour les numéros à venir.

Ce numéro est tourné vers l’avenir. Penser l’avenir c’est s’appuyer sur le passé – « le passé est la lanterne du futur » selon les mots de Hacène Mazouz –, c’est s’ancrer dans le présent pour envisager des continuités et jeter des ponts vers ce qui n’est pas encore, ce qui peut advenir et qui est souhaitable.

Avec vous, demandons-nous ce que sera, demain, le métier de professeur documentaliste. Un enseignant à part entière, producteur de contenu pédagogique ? Un spécialiste des médias ? Un organisateur de projets ou de contenus culturels ? Le CDI du futur sera-t-il écologique ? numérique ? ludique ? en réseau ? hors les murs ?

Le CDI sera-t-il Black Mirror ou Wonderful World ?

À vos plumes et à vos claviers pour nous envoyer vos contributions avant le 30 avril 2022 !

Pour une préparation optimale du numéro, n’hésitez pas à contacter la Rédaction au plus tôt : intercdi.articles@gmail.com

L’EMI au cycle 3 : un objet de paradoxes

Les travaux académiques mutualisés ont pour but de produire de la réflexion sur le numérique en lien avec le cadre de référence des compétences numériques (CRCN) et participent au développement d’une culture numérique1. En privilégiant les partenariats interacadémiques, il s’agit de travailler de manière approfondie en rapport avec un sujet disciplinaire et d’expérimenter une séquence pédagogique. Le fruit de ce travail d’équipe fera l’objet d’une fiche synthétique publiée sur le site national Edubase2 qui regroupe les pratiques pédagogiques en lien avec le numérique.

Dans le cadre des TraAM 2020/2021, dont la thématique en documentation est Continuum de formation et compétences informationnelles : quelle place le professeur documentaliste occupe-t-il dans le processus d’acquisition de la culture informationnelle ? nous voulions travailler, dans l’académie de Bordeaux, sur la notion même d’Éducation aux médias et à l’information (EMI) et sur sa définition qui nous semblait être au cœur du métier d’enseignant documentaliste. La thématique de l’année des TraAM nous a orientée sur la liaison École-Collège.
Afin d’élargir notre recherche, nous avons pris contact avec d’autres enseignantes documentalistes qui participaient aux TraAM dans d’autres académies, ce qui nous permis de réaliser une recherche inter académique sur l’Éducation aux médias et à l’information au cycle 3 dans le premier degré3.
Notre objectif était d’étudier la mise en œuvre de l’EMI dans les classes de CM1 et CM2. De plus, nous voulions modéliser une culture de l’information spécifique au Cycle 3 dans le premier degré, c’est-à-dire dessiner les contours théoriques se dégageant des représentations et des pratiques déclarées des professeurs des écoles. D’autres collègues ont travaillé sur des objectifs plus concrets tels qu’un travail sur les compétences engagées ou des outils nécessaires aux professeurs des écoles. Tout ceci avait pour but de mieux adapter la pédagogie documentaire à l’entrée en 6e 4.

Point théorique sur l’EMI au Cycle 3

Avant de débuter notre travail de recherche, nous nous sommes intéressées tant aux directives ministérielles et aux recommandations pédagogiques qu’aux représentations du numérique des enseignants.
Selon le ministère de l’Éducation nationale, « [l’EMI] doit être intégrée à tous les enseignements. À l’heure des médias de masse et des réseaux numériques, garantir à tous les élèves la maîtrise de ces compétences contribue à la réduction des inégalités culturelles et sociales. C’est donc une nouvelle responsabilité qui s’impose à l’École » (MEN, 2018)5. Cependant, les recommandations pour la mise en œuvre de l’EMI demeurent, selon les enseignants, complexes et pauvres et entrent souvent en conflit avec le rapport au numérique des enseignants qui regrettent le manque de formation et de moyens (Pascau, 2021). Ainsi, la question de l’EMI dans l’Éducation nationale est loin d’être tranchée. Trouver un consensus semble difficile tant pour une définition des contenus à transmettre que pour un déploiement dans les établissements scolaires (Frau-Meigs, Loicq & Boutin, 2014). C’est la raison pour laquelle nous avons voulu approfondir ce sujet. Dans cet article, nous proposons une modélisation de l’EMI au cycle 3 en nous appuyant sur les verbatims des enseignants. Nous expliciterons tout d’abord notre méthode de recherche puis nous détaillerons nos résultats de recherche.

Contextualisation de la recherche et méthodologie

Nous avons choisi, pour mener notre réflexion par le biais d’une recherche scientifique, une méthodologie empirique en deux temps, quantitative et qualitative, avec un questionnaire en ligne et des entretiens qualitatifs à destination des enseignants ayant en charge des classes de CM1 ou de CM2. Notre corpus de recherche avec soixante-neuf réponses au questionnaire et dix entretiens nous permet d’avoir un échantillonnage riche et hétérogène qui se répartit sur quatre académies : Guyane, Lille, Nantes et Bordeaux. Nous en avons extrait des statistiques et des discours représentatifs et explicatifs sur l’EMI. Nous précisons entre parenthèses la question à laquelle correspond le verbatim ou les données chiffrées auxquels nous faisons référence.
Le questionnaire réalisé sur Google Forms et diffusé via un lien par mail comportait vingt-neuf questions réparties en quatre thématiques (annexe 1) : le positionnement théorique des répondants par rapport à l’EMI ; la réalité de la mise en œuvre de cette éducation dans les établissements (difficultés notamment) ; les compétences relatives à l’EMI et leur évaluation ; la liaison école-collège et les rapports entretenus avec l’enseignant documentaliste à travers le prisme de l’EMI.
Le graphique ci-dessous montre la répartition des réponses par département.

Figure 1 – Répartition des réponses au questionnaire par département

Pour le volet qualitatif, nous avons procédé à des entretiens semi-directifs et compréhensifs ; le corpus de verbatims recueillis lors des entretiens sert à illustrer les données chiffrées et à expliciter les tendances extraites du questionnaire. L’entretien compréhensif, à partir d’une grille indicative de questions, donne une certaine souplesse permettant de questionner le sujet en tenant compte de ses réponses, sous la forme d’une discussion entre pairs ou d’un partage d’expériences et souvent sur le ton de la confidence. Les dix entretiens se répartissent de manière homogène dans les trois académies, sur une période de quatre mois. Ils ont été menés soit en présentiel, soit en distanciel.

Le tableau ci-dessous montre la répartition chronologique des entretiens au sein des académies. Le codage employé (Établissement Scolaire + Numéro de département + Numéro d’entretien dans le département) permet de citer les répondants en respectant leur anonymat.

Tableau 1 – Répartition des entretiens

Les verbatims récoltés nous ont permis d’avoir un corpus de recherche riche sur lequel nous nous sommes appuyées pour dessiner les contours théoriques de l’EMI. D’une durée moyenne d’une trentaine de minutes, les entretiens visent à connaitre la définition de l’EMI et ses caractéristiques, la réalité de l’implémentation de l’EMI dans les classes (difficultés rencontrées, pratiques évaluatives, part du numérique dans l’EMI). (Guide d’entretien, Annexe 2.)

Limites et biais de la recherche

Nous avons rencontré des difficultés quant à la diffusion du questionnaire pour communiquer directement avec les professeurs des écoles. Nos différentes tentatives pour transmettre notre lien ont souvent échoué et nous avons eu besoin de relancer régulièrement nos contacts.
Cependant, notre échantillonnage de soixante-neuf réponses s’avère intéressant car hétérogène : en effet, nous sommes parvenues à réunir des réponses réparties sur onze départements de cinq académies différentes.
Nous regrettons le peu d’entretiens qu’il nous a été possible de mener mais il a été difficile pour nous de convaincre les répondants au questionnaire en ligne de participer à un entretien d’approfondissement. Les professeurs des écoles ayant répondu favorablement sont souvent des personnes de notre entourage professionnel direct ou avec qui nous avons développé des relations professionnelles privilégiées. Cependant, nous avons veillé à préserver notre objectivité.

À partir des réponses aux questionnaires et de l’analyse discursive des entretiens, nous allons exposer quelques caractéristiques de l’EMI telles que nous les avons analysées. L’EMI s’est imposée à la lumière de nos résultats comme un objet de paradoxes ce que nous allons tenter de démontrer.

Un objet d’étude entre réflexion et procédure

Les réponses à la question « Q 4 – Donnez 3 mots clés relatifs selon vous à l’Éducation aux Médias et l’Information (EMI) » ont permis de recueillir les représentations que les répondants ont de l’EMI. Trois axes se dégagent, à savoir les médias, la recherche d’information et l’esprit critique. Il en émerge une notion dichotomique avec une double préoccupation : procédurale et réflexive.

Les définitions données en entretien « E2 – Quelle définition donnez-vous à l’EMI ? » confirment ce premier aspect paradoxal et rejoignent les représentations observées à travers le nuage de mots. Toutefois, elles demeurent floues et partielles ; L’EMI sert à “comprendre le monde mais en le décortiquant” (ES33-2). Pour d’autres enseignantes, l’EMI, “c’est savoir rechercher des informations pour mieux s’éduquer, si on peut dire” (ES 973-01) ou c’est “apprendre à se servir de… apprendre aux enfants ce qu’est une information, quels sont les supports d’information, comment on fait le tri entre des informations avérées ou pas, les sources du coup les différents médias” (ES33-1). Dans la définition suivante, nous remarquons que l’EMI est définie comme comportant deux volets : “c’est deux versants, le versant comment on s’en sert – je ne sais pas…- pour rechercher, pour trouver des informations, et de l’autre côté le versant justement avoir un regard critique aussi sur tout ce qu’on trouve sur internet, sur ce qu’on peut faire, pas faire” (ES 973-2).

L’EMI : Kesako ? Une notion inconnue mais indispensable

Tout au long des entretiens, nous avons remarqué que l’EMI n’était pas une notion évidente pour les professeurs des écoles rencontrés : l’EMI semble relever du second degré. Lorsque nous leur avons présenté la thématique de l’EMI, nous avons dû expliciter quasi systématiquement le sigle. Certains (ES973-2) voient vaguement de quoi il retourne : Si, si, cela doit apparaître, alors moi je… il faudrait que je regarde plus précisément dans les programmes (Réponse à une relance à la question « E2 – Cela apparaît dans vos programmes ou tu ne vois pas du tout de correspondance ? »). Cela s’explique par la méconnaissance des recommandations institutionnelles de la part des enseignants alors qu’il existe un texte officiel sur les Orientations pour l’éducation aux médias et à l’information (EMI) Cycles 2 et 3 émanant du ministère de l’Éducation nationale (MEN 2018).
Même si cela peut sembler une évidence, nous pouvons souligner qu’il n’y a pas d’enseignant documentaliste dans le premier degré, ce qui peut expliquer le manque de sensibilisation des professeurs des écoles à l’EMI.
Cependant, nous notons un consensus de la part des enquêtés sur la nécessité absolue de l’EMI à l’école sans savoir la définir précisément : ils ne sont qu’une minorité à la réfuter (moins de 3 %). En réponse à la question « Q5 – Pensez-vous qu’aborder l’EMI soit indispensable pour les élèves ? Plusieurs réponses possibles », ils sont 80 % à dire que l’EMI forme à des pratiques d’information raisonnées, 60 % à choisir la culture générale et 40 % à déclarer que l’EMI est utile pour la continuité de la scolarité.
Enfin, en réponse à la question « Q7 – Mettez-vous en œuvre l’EMI dans votre établissement pour le cycle 3 ? », 71 % des répondants affirment déployer l’EMI en classe. Un tiers des enseignants du premier degré interrogés ne fait donc pas d’EMI alors que la quasi-majorité l’estime indispensable.
Quelles conclusions en tirer ? Les professeurs des écoles semblent faire de l’EMI sans le formaliser. Complexe et difficile à cerner pour les répondants, l’EMI est une notion encore mal connue dans le primaire, sans doute parce qu’elle est insuffisamment théorisée, et qu’elle n’a pas encore fait l’objet d’une réflexion didactique adaptée aux élèves de ces cycles d’enseignement ; les enseignants, de ce fait, peuvent se sentir impréparés, et surtout mal armés quand il s’agit de la mettre en œuvre même s’ils la jugent indispensable. Les problématiques temporelles et techniques entrent sûrement également en jeu.

L’EMI entre émotions et esprit critique

Il ressort de cette étude que l’EMI est une réponse à des problématiques sociales actuelles qui relèvent de la société de l’information et qui interrogent la place et le rôle des médias dans la société. Les enseignants traitent des sujets relatifs à l’EMI quand ils sentent que les apprenants en ont besoin et selon ce à quoi ils sont confrontés dans leur vie de futur citoyen. Les séances pédagogiques mises en œuvre dans ce cadre prennent en compte leurs réactions affectives et émotionnelles en rapport avec l’information. Une enseignante nous confie s’adapter à ce que vivent ses élèves : “Nous, l’information c’est plutôt l’information sur la documentation, pas tellement sur des sujets d’actualité, sauf quand ça touche l’école, quand ça touche les valeurs de la république ou des fois on la traite parce qu’ils en ont besoin et qu’on le sent » (ES 33-2). (« E4 – Comment travaillez-vous en EMI en classe de CM1-CM2 ? »)

Nous pouvons souligner la posture de médiateur des enseignants entre l’élève et l’information dans la mise en œuvre de l’EMI notamment pour aborder les médias et l’information d’actualité, dans une forme de régulation et d’explicitation en partant de leur vécu et de leurs expériences.

L’EMI moins importante que les mathématiques ?

Bien que considérée par tous comme indispensable, l’EMI est ainsi très loin d’être systématiquement mise en place dans les établissements scolaires. Les raisons invoquées sont liées à des problèmes d’ordre matériel ou temporel. Il est souvent question d’un manque d’ordinateurs, ou de connexion internet défectueuse dans la classe pour expliquer l’impossibilité de travailler en EMI. Parfois, les disciplines telles que le français ou les mathématiques prennent le pas sur l’éducation à l’information : Néanmoins, je ne réalise pas de progression EMI en tant que telle et je trouve peu le temps d’en faire (« E4 – Comment travaillez-vous en EMI en classe de CM1-CM2 ? ») nous confie une enseignante (ES62-1). Le manque de connaissances des ressources explique aussi cette situation : les formations sur le thème de l’EMI sont assez rares d’après les répondants. Une enseignante (ES973-2) regrette le manque de programme et d’organisation de l’EMI : Du tout, parce qu’on n’a pas de formation, on n’a pas d’outils non plus. On nous donne ça comme ça.
Les modalités de formation diffèrent suivant les écoles : pour 50 % des professeurs des écoles interrogés, l’approche de l’EMI est transversale, alors que 34 % l’abordent dans le cadre de projets spécifiques (« Q9 – Comment abordez-vous l’EMI ? »). L’évaluation (« Q17 – Comment évaluez-vous les élèves en EMI ? ») est, quant à elle, inexistante pour la moitié des répondants. Quand elle a lieu, il s’agit de validation de compétences prédéfinies en amont ou de réinvestissement pour d’autres activités d’apprentissage.
Nous pouvons parler d’un saupoudrage avec une adaptation pédagogique hétérogène spécifique à chaque enseignant et à chaque établissement, la priorité allant à des contenus disciplinaires considérés comme essentiels.

Une notion commune qui ne sert pas de passerelle entre l’école et le collège

Enfin, la liaison école/collège concerne très peu l’EMI et, selon les résultats du questionnaire, l’enseignant documentaliste n’est pas un partenaire « naturel » de cette liaison. 7 % des projets seulement concernent l’EMI et seuls 8 % des professeurs des écoles travaillent avec un enseignant documentaliste (« Q23 – Faites-vous des actions EMI dans le cadre de la liaison école/collège (projets en EMI intégrant le collège) ? » ; et « Q24 – Travaillez-vous en collaboration avec les enseignants du collège de secteur (pour l’EMI ou autre) ? »).
Une enseignante (ES33-2) le déplore : On a fait beaucoup de projets, ça fait des années qu’on fait des projets avec le collège mais pas vraiment sur cette thématique là, sur d’autres mais c’est vrai que ça serait peut-être à proposer. Une autre (ES62-2) souligne les contraintes bloquant le développement de partenariats : J’aimerais bien avoir des documents d’ailleurs de ta part pour mettre en œuvre l’EMI, en connaissant ta progression 6e. Maintenant, pour ce qui est du numérique, la chose serait compliquée en CM2… Je serais partante pour remettre en place ce genre de chose en EMI… mais sans ordinateur (« E6 – Pensez-vous qu’il peut exister une continuité de l’EMI entre l’école et le collège ? »).
Il nous semblait intéressant d’approfondir les missions de l’enseignant documentaliste en tant qu’enseignant et personne-ressource, et partenaire potentiel du premier degré : en effet, 90 % des enseignants sont favorables à des actions de sensibilisation ponctuelles dans leur classe dans le cadre de la liaison école/collège (« Q28 – Seriez-vous favorable à l’intervention d’un enseignant documentaliste référent en EMI pour des actions de sensibilisation ponctuelles dans votre classe dans le cadre de la liaison école-collège ? »).

Ainsi selon les enseignants enquêtés, alors que l’EMI représente une thématique transversale essentielle qui se poursuit dans le second degré, la liaison école-collège est loin d’être systématique et mériterait d’être davantage développée.

Perspectives

L’EMI apparaît bien comme un objet de paradoxes : cependant, selon nous, cela fait aussi sa spécificité et sa richesse. Les contours théoriques ébauchés, entre transversalité et citoyenneté, en passant par un essaimage optimisé, nourriront les pratiques pédagogiques.

Figure 2 – Modélisation EMI au cycle 3

Notre recherche dans le cadre des TraAM ne se limite pas à ce travail réflexif autour de l’EMI ; nous avons travaillé également sur les compétences en EMI au cycle 3 et avons voulu les mettre en rapport avec les apprentissages au collège. Nous avons aussi souhaité créer des ressources et des outils pour aider à l’intégration de l’EMI dans le premier degré mais aussi à la transition école/collège, que nous avons mis en ligne sur Internet et qui feront sûrement l’objet d’une publication ultérieure. Nous avons esquissé l’idée que les enseignants documentalistes pourraient devenir des personnes ressources pour les enseignants du premier degré tant pour les accompagner dans la pédagogie en EMI que pour la mise à disposition de ressources.

Afin de poursuivre notre réflexion, nous aimerions suivre le développement de l’EMI sur une année dans une ou deux classes au cycle 3 afin de pouvoir cerner les contenus abordés sur le long terme : ce sera sûrement l’objet de notre travail pour l’année 2021-2022.

 

Annexe 1 – Questionnaire en ligne

Q1 – Vous êtes actuellement enseignant…
Une seule réponse possible.
En CM1
En CM2
En double niveau CM1/CM2
En CM1+Secondaire (enseignant spécialisé)
En CM2+Secondaire (enseignant spécialisé)
En double niveau CM1/CM2 + Secondaire (enseignant spécialisé)

Q2 – Dans quel département (numéro de département) exercez-vous ?

Q3 – Quelle est la taille de l’école primaire dans laquelle
vous exercez ?
Une seule réponse possible.
Moins de 100 élèves
Entre 100 et 200 élèves
Entre 200 et 300 élèves
Plus de 300 élèves

Q4 – Donnez 3 mots clés relatifs selon vous à l’Éducation
aux Médias et à l’Information (EMI)

Q5 – Pensez-vous qu’aborder l’EMI soit indispensable
pour les élèves ?
Plusieurs réponses possibles.
Oui, pour la suite de la scolarité
(pour que les élèves ne soient pas perdus au collège)
Oui, pour la culture générale de l’élève
Oui, pour le développement de « bonnes pratiques d’information »
Non
Autre

Q6 – Si non, pourquoi ?

Q7 – Mettez-vous en œuvre l’EMI dans votre établissement pour le cycle 3 ?
Une seule réponse possible.
Oui Non

Q8 – Si non, pourquoi ?

Q9 – Comment abordez-vous l’EMI ?
Plusieurs réponses possibles.
Vous abordez explicitement l’« EMI » en dehors des apprentissages disciplinaires quotidiens
Vous l’abordez de façon transversale entre les disciplines
Vous l’abordez dans le cadre de projets spécifiques
Vous ne faites rien de spécial ; c’est implicite
Autre. Précisez

Q10 – Comment vous organisez-vous dans les temps
de cours ?
Une seule réponse possible.
Vous proposez des temps dédiés « EMI » supplémentaires dans l’emploi du temps des élèves
Vous intégrez transversalement l’EMI dans l’emploi du temps des élèves, au sein des disciplines
Vous ne faites pas d’EMI

Q11 – Quelles compétences en EMI abordez-vous en classe ?
Plusieurs réponses possibles.
Rechercher, identifier et organiser l’information
Écrire, créer, publier, réaliser une production collective
Découvrir ses droits et ses responsabilités dans l’usage des médias
Découvrir et s’approprier un espace informationnel et un environnement de travail
Découvrir les médias sous leurs différentes formes
Aucune

Q12 – Dans le cadre de la mise en œuvre de l’EMI, abordez-vous de façon différenciée les médias papiers et numériques avec les élèves ?
Une seule réponse possible.
Oui, vous expliquez aux élèves la/les différence.s entre ces deux types de médias
Non, vous abordez ces deux types de médias sans vous attarder sur leur.s différence.s
Vous n’abordez que les médias papiers
Vous n’abordez que les médias numériques
Vous n’abordez ni les médias papiers, ni les médias numériques

Q13 – Avez-vous des difficultés matérielles à la mise en œuvre de l’EMI ?
Une seule réponse possible.
Oui Non

Q14 – Si oui, lesquelles ?

Q15 – Avez-vous des difficultés personnelles ou organisationnelles à la mise en œuvre de l’EMI (manque
de temps et/ou de compétences) ?
Une seule réponse possible.
Oui Non

Q16 – Si oui, lesquelles ?

Q17 – Comment évaluez-vous les élèves en EMI ?
Une seule réponse possible.
Aucune évaluation
Validation de compétences prédéfinies en amont
Réinvestissement pour d’autres activités
Autre. Précisez

Q18 – Avez-vous déjà entendu parler de PIX ?
Une seule réponse possible.
Oui, vous savez précisément de quoi il s’agit
Oui, vous connaissez le sigle mais vous auriez des difficultés à expliquer ce que c’est en détails
Non

Q19 – Avez-vous discuté avec les élèves de la certification numérique qu’ils passeront au cycle 4 ?
Une seule réponse possible.
Oui Non

Q20 – Cliquez ci-dessous sur les repères que vous seriez susceptible d’aborder avec vos élèves ou que vous abordez déjà avec les élèves
Plusieurs réponses possibles.
Mener une recherche simple
Mettre en relation des informations
Sauvegarder des fichiers
Publier des contenus en ligne
Signaler des contenus en ligne
Protéger sa vie privée
Utiliser un outil d’écriture collaborative
Créer un traitement de texte simple
Mettre en page simplement le contenu d’un traitement
de texte
Numériser une image ou un son
Réaliser du codage simple
Savoir ce qu’est une donnée à caractère personnel
Comprendre qu’une utilisation non réfléchie du numérique peut avoir un impact sur sa santé
Savoir de quoi est composé matériellement un espace
de travail informatique (exemple : souris, clavier)
Savoir se connecter à un ENT
Aucun

Q21 – Faites-vous des actions pour la liaison école/collège
(en-dehors de l’EMI) ?
Une seule réponse possible.
Oui Non

Q22 – Si oui, lesquelles ?

Q23 – Faites-vous des actions EMI dans le cadre de la liaison école/collège (projets en EMI intégrant le collège) ?
Une seule réponse possible.
Oui Non

Q24 – Travaillez-vous en collaboration avec les enseignants
du collège de secteur (pour l’EMI ou autre) ?
Une seule réponse possible.
Oui Non

Q25 – Travaillez-vous en collaboration avec l’enseignant-documentaliste du collège de secteur (pour l’EMI ou autre) ?
Une seule réponse possible.
Oui Non

Q26 – Avez-vous bénéficié d’une sensibilisation à l’EMI (formation) ?
Une seule réponse possible.
Oui Non

Q27 – Quels supports utilisez-vous pour mettre en œuvre l’EMI (personnels, institutionnels) ?

Q28 – Seriez-vous favorable à l’intervention d’un enseignant documentaliste référent en EMI pour des actions de sensibilisation ponctuelles dans votre classe dans le cadre
de la liaison école-collège ?
Une seule réponse possible.
Oui Non

Q29 – Seriez-vous favorable à l’intervention d’un professionnel de l’EMI autre qu’un enseignant documentaliste pour des actions de sensibilisation ponctuelles dans votre classe dans
le cadre de la liaison école-collège ?
Une seule réponse possible.
Oui Non

 

Annexe 2 – Grille d’entretien

E1 – Trois mots-clés qui se rapportent à l’EMI

E2 – Quelle définition donnez-vous à l’EMI ?

E3 – Considérez-vous l’EMI comme indispensable au cycle 3 ? Expliquez

E4 – Comment travaillez-vous en EMI en classe de CM1-CM2 ?

E5 – Quelles compétences en EMI attendez-vous des élèves ?

E6 – Pensez-vous qu’il peut exister une continuité de l’EMI entre l’école et le collège ?

E7 – Comment envisagez-vous la continuité de l’EMI entre l’école et le collège ?

E8 – Quelle(s) compétence(s) EMI vous semble(nt) indispensable(s) mais s’avèrent dans les faits difficiles
à mettre en œuvre dans votre établissement ?

E9 – Quelles seraient selon vous les limites potentielles
à la mise en œuvre de l’EMI dans votre école ?

E10 – Quelles seraient selon vous les facteurs favorisant
la mise en œuvre de l’EMI dans votre école ?

E11 – Quels intervenants pensez-vous pouvoir contacter pour des interventions EMI dans votre établissement ? En dehors de votre établissement ?

E12 – À quel(s) type(s) d’intervenant(s) aimeriez-vous pouvoir faire appel ?

E13 – À quelle(s) ressource(s) numérique(s) avez-vous accès dans votre établissement ?

E14 – Quelle(s) ressource(s) numérique(s) supplémentaire(s) serai(en)t selon vous utiles pour la mise en œuvre de l’EMI dans votre établissement ?

 

 

Les réseaux sociaux

DU POSITIF ET DE L’HUMOUR POUR COMMENCER

L’humain est sociable par définition et il a besoin d’être reconnu par ses pairs. Être exclu du groupe, génère de la honte et de l’anxiété. À cet égard, les sites de réseautage social fonctionnent comme un nouveau système d’appartenance, d’où leur développement. Certains titres prennent en compte ces nouvelles expériences sociales et leurs vertus comme dans La ligue des amis imaginaires d’Agnès Marot ou quand Internet rapproche et crée des amitiés fortes. Ce récit met en scène trois adolescents qui se rencontrent via les réseaux et fondent un groupe. Des adolescents aux parcours et origines bien différents mais qui vivent des situations difficiles : phobie sociale, poids des traditions et maladie. Pas larmoyant mais plutôt optimiste et frais, ce roman est une ode à l’amitié, même si elle est virtuelle. Grâce à sa forme qui mêle différents supports : échanges de mails, extraits Whats’app, Twitter, photos Snapchat et même journal intime, ce récit actuel se lit d’une traite. Il sera apprécié par les plus jeunes (6e et 5e) et montre que la présence sur les réseaux sociaux ne doit pas remplacer celle dans la vraie vie. Sophie Rigal-Goulard dans 15 jours sans réseau, explore avec esprit ces nouveaux besoins et confirme l’addiction qu’ils suscitent. Émilie et sa famille partent en vacances dans la Creuse pour se couper des réseaux. C’est le choix de ses parents mais pas celui d’Émilie et ses frères, accros à Internet. Comment vivre ces vacances sans wifi ? Défi insurmontable ? Pas si sûr car les adolescents vont finir par s’habituer et réinventer leur quotidien. Ce roman choisit l’angle de l’humour pour aborder cette addiction de plus en plus prégnante chez les jeunes (et les moins jeunes) et cela fonctionne bien. Pas simple de se couper du monde et la tentation est grande de retourner sur la toile, qui, par bien des aspects, il faut le reconnaître, nous simplifie la vie. Le ton est juste et l’autrice ne rejette pas en bloc Internet ; elle essaie adroitement de proposer des alternatives, ce qui est plutôt plaisant. Une lecture fluide et facile dès la 6e. Enfin dans Le monde selon Walden de Luc Blanvillain, l’original Walden, collégien, devient malgré lui la superstar des réseaux sociaux. Il utilise cette notoriété soudaine pour servir de bonnes causes : qu’elles soient humanitaires, écologiques… Mais cette surmédiatisation finit par l’ennuyer, d’autant plus qu’il devient aussi une cible économique, ce qu’il ne souhaite pas. Il veut reprendre le contrôle de sa vie. Un récit drôle et intelligent pour parler du pouvoir des réseaux sociaux à mettre entre les mains des élèves de 6e ou 5e. L’écrivain réussit à ne pas stigmatiser, juste à amener à réfléchir par soi-même en mettant en lumière les côtés positifs et négatifs de ces outils numériques. Une belle illustration, comme dans l’ouvrage d’Henry David Thoreau, qu’il faut s’abstraire du monde et de ses désirs pour devenir réellement soi-même.

ET DES ROMANS PLUS ALARMISTES

Chantage, menace et cyberharcèlement

Le harcèlement revêt de nouvelles formes avec l’explosion des réseaux sociaux et la littérature jeunesse a su s’emparer de ce sujet pour mettre en garde les adolescents contre ces pratiques calomnieuses. Les romans sont nombreux et les scénarios souvent graves. Cachés derrière un écran, les jeunes ne mesurent pas toujours leurs propos et les conséquences peuvent être dramatiques : perte de l’estime de soi, repli, dépression, tentative de suicide. En effet, les rumeurs et médisances se propagent comme une traînée de poudre à l’échelle du virtuel. Trois récits méritent le détour et pourront être proposés dès la 4e. Arthur Ténor dans la collection « Engagé » chez Scrineo signe un récit percutant : La guerre des youtubeurs. Amy, 14 ans, est célèbre et riche grâce à sa chaîne Youtube, « Amycoquette », mais ce n’est pas du goût de tout le monde. Si bien qu’elle devient la cible d’un youtubeur masqué qui se déchaîne contre elle. Titouan, un camarade de classe, voudrait l’aider mais comment lutter contre des détracteurs anonymes qui se lâchent gratuitement ? Un roman fort dont l’objectif est de sensibiliser les jeunes au cyberharcèlement et ses répercussions. Il permet une prise de conscience de la notion de responsabilité et des poursuites judiciaires possibles. Poignant et dramatique, cet ouvrage manque toutefois de nuance.
Quand Marion se laisse séduire par Enzo, le caïd du collège, elle, si solitaire et sensible, rayonne. Mais le bonheur est de courte durée, puisqu’elle comprend qu’elle a été victime d’une machination de la part d’Enzo et ses copains. Ces derniers l’ont filmée alors qu’Enzo l’embrassait et ont publié la vidéo suggestive sur YouTube. C’est l’enfer pour Marion qui décide de se venger. Tel est le thème du roman La fille seule dans les vestiaires des garçons d’Hubert Ben Kemoun. Ce dernier évoque la cruauté des adolescents et la surexposition que provoquent les réseaux sociaux. Un fait qui restait isolé auparavant fait dorénavant le buzz sur Internet avec des effets dévastateurs chez celui qui en est victime. C’est un récit incisif où l’on ressent vraiment les émotions de l’héroïne.
Enfin, Ma réputation de Gaël Aymon met en scène Laura, une jeune lycéenne qui préfère la compagnie des garçons. Quand Sofiane, un de ses amis, essaie de l’embrasser, elle se fait exclure du groupe. C’est alors la descente aux enfers : Laura se retrouve seule et devient victime des pires ragots sur les réseaux sociaux. Une situation dont elle n’arrive pas à parler à ses parents ou professeurs. Un roman court et poignant sur le rejet, l’intimidation, le harcèlement et le rôle des nouveaux médias sur Internet.

Images volées et harcèlement sexuel

Deux romans intenses peuvent être proposés aux élèves de 3e et lycéens sur cette thématique délicate ; ils visent à dénoncer et alerter les jeunes contre les agressions sexuelles via le Net. Mauvaise connexion de Jo Witek dans lequel Julie se fait manipuler par un prédateur sexuel. Adolescente passionnée de mode, elle s’inscrit sur un tchat sous le pseudo de « Marilou » et fait la connaissance de Laurent, un photographe âgé de 20 ans. Il lui promet une carrière de mannequinat et l’ensorcelle. Très vite, elle tombe amoureuse de lui et s’enferme dans cette relation virtuelle. Tendre et affectueux au départ, il va ensuite l’obliger à se dévêtir pendant qu’il la photographie via sa webcam. Même si elle se dégoûte, elle ne peut s’empêcher de continuer. L’autrice détaille avec justesse cet engrenage qui amène la jeune fille à être soumise. Une manipulation sournoise qu’utilisent ces cyber-harceleurs pédophiles. Dans Je voudrais que tu… de Franck Andriat, la narration se partage entre les pages du journal intime de Salomé, qui veut devenir écrivain et les échanges de sa bande d’amis sur leur « chat d’or », un réseau social où chaque membre s’engage à écrire en bon français et à ne pas s’insulter. Lorsque deux nouveaux adolescents s’invitent à ces discussions, le ton change ainsi que les propos. Une jeune fille en souffrance livre son expérience de jeu sexuel. Par ce récit, l’auteur dévoile les déviances d’Internet, surtout sur les êtres les plus fragiles, notamment la pornographie ou les images volées. Il exhorte aussi les jeunes à avoir de vraies relations plutôt que des échanges virtuels. Le final est tragique mais il amène les protagonistes à réfléchir. À ne pas mettre entre les mains des plus jeunes même si l’illustration de couverture est naïve et le livre court.

Identité numérique et mensonge

L’adolescent, pour se construire, cherche à se conformer aux normes de son groupe d’appartenance ; il est en quête d’une reconnaissance sociale par ses pairs. C’est pourquoi, il veut donner une bonne image de lui, quitte à travestir la réalité. Ces situations sont exposées dans deux romans où les personnages s’inventent une autre identité : Dans de beaux draps et Fake, fake, fake. Marie Colot évoque, dans le premier, le mensonge et le cyberharcèlement à travers l’histoire de Jade, 14 ans. Cette dernière fait partie d’une famille recomposée un peu compliquée, puisqu’elle n’a pas moins de cinq frères et sœurs issus de mariages différents, et ça ne s’arrête pas là, car elle voit débarquer Rodolphe, le fils le plus âgé de son beau-père dont elle ignorait l’existence. Parce qu’il a 20 ans et beaucoup de charme, l’adolescente poste une photo de lui sur son mur Facebook en faisant croire que c’est son nouveau petit ami. Une gloire soudaine sur les réseaux sociaux l’encourage à persévérer dans ses affabulations. Elle réinvente sa vie pour attirer l’attention, mais, brusquement, cela se retourne contre elle ; la voilà prise à son propre piège. Elle va alors être victime d’ignobles rumeurs et d’injures gratuites. Tout l’intérêt de ce récit est de montrer que la popularité sur Internet peut atteindre des sommets avant de retomber comme un soufflet. Il est très facile d’enjoliver son image sur les réseaux, mais la réalité finit par vous rattraper. Le sujet est sérieux mais l’optimisme et la légèreté dédramatisent ce récit, le rendant accessible dès la 5e. Fake, fake, fake de Zoé Beck est destiné aux collégiens à partir de la 4e et raconte l’histoire d’Edvard, 14 ans. Pour plaire à Constance et parce qu’il est mal dans sa peau, il crée un faux profil sur Facebook. Il devient donc Jason, un bel Américain en voyage scolaire. Sa notoriété augmente et il accumule les mensonges ; comment échapper à cet engrenage ? Même si l’intrigue ne tourne pas qu’autour de l’usurpation d’identité sur Internet, elle permet d’appréhender ce phénomène qui peut, dans certains cas, mal se terminer.

Gérer sa célébrité sur YouTube

YouTube est une machine à créer de nouvelles stars, parfois éphémères et issues de tous milieux. Cette surmédiatisation n’est pas sans conséquence car le youtubeur est tenu d’apparaître sous un beau profil ; il doit constamment communiquer avec sa communauté et obéir aux diktats des marques qui négocient des contrats juteux avec eux. Un statut pas toujours facile à gérer car il s’avère difficile pour ces célébrités de vivre en dehors des écrans et c’est ce qu’ont très bien montré ces deux romans récemment publiés. Dans C’est pas ma faute coécrits par Anne-Fleur Multon et Samantha Bailly, la jeune Lolita est une influenceuse beauté populaire, jusqu’au jour où elle disparaît des réseaux. Prudence, une admiratrice de la première heure, s’interroge sur ce soudain silence. Qu’est-il arrivé à la célèbre youtubeuse ? Un roman qui fait alterner les voix des deux adolescentes de même que le temps (la disparition de la jeune fille étant la date de référence). Ce thriller montre à quel point les deux jeunes filles sont dépendantes des réseaux : l’une est rattrapée par la célébrité qu’elle ne peut plus assumer seule, l’autre est une fan inconditionnelle qui vit au travers des vidéos de la youtubeuse. L’occasion de dénoncer les aspects pervers du système : chantage commercial, dénigrement des internautes, narcissisme… Dans Les enfants sont rois de Delphine de Vigan, ce sont deux enfants qui sont piégés dans la folie YouTube. Mélanie, leur maman, expose sur sa chaîne « Happy Récré » les faits et gestes de ses bambins comme le déballage de cadeaux, les « yes challenge » au cours desquels leur maman dit oui à tout et autres mises en scène. Dans cette course aux followers, elle oublie les vrais besoins de ses enfants qui deviennent des marchandises. Mais un jour, sa fille est enlevée et l’enquête cherche à déterminer qui pourrait lui en vouloir. Un livre glaçant sur la triste réalité des enfant youtubeurs victimes de leurs parents. Intimité familiale exhibée, opportunité lucrative avec le placement de produits, enfants instrumentalisés, Delphine de Vigan explique ce nouveau phénomène médiatique et esquisse les répercussions psychologiques chez ces jeunes stars du Web.

Addiction aux écrans et réseaux sociaux

De plus en plus de chercheurs alertent sur les effets inquiétants des réseaux sociaux sur le cerveau, et sur leurs dangers pour les adolescents. Même Facebook a reconnu que la consommation de contenus, quand elle est passive, peut avoir un impact négatif sur le bien-être. La fréquence des rencontres entre jeunes a diminué ces dernières années au profit des écrans. Parallèlement, le pourcentage d’adolescents dépressifs ou déclarant se sentir seuls a, quant à lui, augmenté. Et si la corrélation entre temps passé sur son smartphone et dépression existe, la causalité reste difficile à prouver : est-ce sa consultation qui affecte la santé mentale ou les personnes déjà fragiles qui passent plus de temps en ligne ? C’est l’éclairage que nous apporte Christine Deroin avec son roman (Dé)connexions. Enzo, Manon et Clément se rencontrent via les réseaux sociaux et décident de se retrouver autour d’un jeu en ligne. Ils ont des profils bien différents mais sont tous les trois dépendants des écrans jusqu’à berner leurs parents, devenir insomniaques, refuser les vraies relations et même fuir avec des inconnus. « Saison Psy » est une collection intelligente et originale où chaque épisode du récit est ponctué par l’analyse d’un psychologue. Grâce au regard de ce professionnel, le jeune prend conscience des origines, des enjeux, des signes et des conséquences d’une addiction aux écrans et réseaux sociaux. Accessible dès la 6e, ce docu-fiction ne dénigre pas Internet mais met en garde contre la boulimie et l’asphyxie. Serge Tisseron, éminent psychiatre et spécialiste des questions autour de l’usage d’Internet, propose aux collégiens un Guide de survie pour accros aux écrans. À partir de quinze situations que rencontrent les parents et ados connectés, il explique pourquoi une surconsommation d’Internet est dangereuse et prodigue des conseils pour apprendre à gérer son temps. Plutôt que de diaboliser les outils numériques, il souhaite montrer les avantages d’un usage raisonné des écrans. Il aborde, à travers de multiples exemples, les questions d’Éducation aux Médias et à l’Information comme le droit à l’image, l’identité numérique, le pistage et les publicités… Un outil indispensable que l’on peut exploiter avec les élèves avec plusieurs chapitres consacrés aux réseaux sociaux.

Anticipation et monde virtuel

La question des réseaux sociaux n’est pas absente des romans d’anticipation ou dystopies qui s’adresseront aux élèves de 3e et lycéens. Les auteurs ont su imaginer des mondes où Internet est détourné de sa finalité de départ. Les outils ne servent plus à communiquer et partager mais peuvent se révéler redoutables et menaçants. Dans Réseaux de Vincent Vulleminot, le DKB (DreamKatcherBook) a supplanté Facebook. Il s’agit d’un réseau avec une partie diurne publique et une partie nocturne privée sur laquelle les utilisateurs partagent leurs cauchemars. Sixtie, une adolescente, y exorcise ses démons mais un jour, elle voit la mort en direct dans des vidéos qui s’inspirent de ce qu’elle a partagé. Ce roman, complexe par sa structure, est un policier haletant qui pose de nombreuses questions, en particulier sur l’usage des réseaux sociaux où la violence circule librement. L’auteur y brosse les problématiques d’un monde hyper connecté, voire effrayant. Interfeel d’Antonin Arger met en scène une société futuriste où les habitants sont connectés à Interfeel, un réseau qui permet de ressentir les émotions des autres. Nathan et ses amis ont toujours vécu avec ce dispositif et sont persuadés de son bien-fondé mais lorsque leur enseignant se défenestre, leurs certitudes basculent. Est-ce un monde idéal ? Cette dystopie enclenche une réflexion sur l’emprise et l’influence des médias sociaux. Ils nous enferment dans nos certitudes et entravent les vraies relations. Elle permet aussi de faire des liens avec ce que les chercheurs décrivent aujourd’hui, à savoir les bulles de filtres générés par les algorithmes qui amènent les internautes à s’enfermer et s’isoler dans leurs croyances. Joëlle Charbonneau, dans Need, a choisi de mettre en scène un réseau social qui accomplirait tous vos désirs en échange de certaines missions. Celui-ci connaît évidemment un succès fou auprès des adolescents de la ville de Nottawa aux États-Unis. Mais au fil du temps, les contreparties demandées par Need s’avèrent de plus en plus périlleuses. Un excellent thriller qui suscite bien des questions : qu’est-on prêt à faire pour voir s’exaucer ses désirs ? Jusqu’où peut-on aller sous couvert d’anonymat ? Quelle frontière entre la réalité et le virtuel ? Un bon moyen de considérer la manipulation qu’exercent les réseaux sociaux sur les jeunes. Titania 3.0 de Pauline Pucciano nous propulse dans le Paris du XXIIe siècle où chacun doit être connecté pour exister. Jan, poète et solitaire, rencontre Titania, une jeune fille entièrement retouchée et icône des réseaux sociaux. Mais leur histoire d’amour naissante se complique lorsqu’un officier de police demande à Jan d’enquêter sur elle. Derrière cette histoire, c’est la critique d’une société ultra-libérale qui est dessinée : un monde régi par l’argent, l’apparence et les réseaux sociaux avec des laissés-pour-compte, les HR (Hors Réseau). Un livre de science-fiction qui fait froid dans le dos car il pointe des dérives déjà actuelles.

 

 

La folie

Expositions, Musées

Musée d’Art et d’Histoire de l’Hôpital Sainte-Anne, Paris.
Présente une collection d’œuvres d’art réalisées par des patients depuis la fin du XIXe et propose des expositions en lien avec la folie.
https://musee.mahhsa.fr/

Musée d’art et d’histoire de la Psychiatrie de Ville-Evrard, Neuilly-sur-Marne.
https://www.tourisme93.com/document.php?
pagendx=84&engine_zoom=PcuIDFC930001283

Musée Henri Theillou, Clermont.
Histoire de la psychiatrie à Clermont dans l’Oise.
https://www.musee-theillou.fr/

Camisole complète et objets de soin © musée Theillou

Musée les Arcades, Avignon.
Histoire de l’hôpital Montfavet et de la psychiatrie, représentations sociales de la folie, propose de nombreuses expositions : Camille Claudel, les soldats oubliés de la Grande Guerre, entre autres.
http://www.ch-montfavet.fr/decouvrir-le-chm/les-lieux-et-leur-histoire/musee-les-arcades/

« Mental Désordre : Changez le regard sur les troubles psychiques », Cité des sciences, Paris, 2016.
Voir extraits de l’exposition en ligne.
https://www.cite-sciences.fr/fr/ressources/expositions-passees/mental-desordre/lexposition/


Exposition « Charcot : une vie avec l’image », La Pitié Salpêtrière, Paris, 2014.
https://www.aphp.fr/contenu/exposition-charcot-une-vie-avec-limage-du-12-mai-au-9-juillet-2014-la-pitie-salpetriere
https://www.aphp.fr/sites/default/files/presse/1249/Charcot-DP-VF.pdf (dossier de presse)

Exposition « La folie en tête, aux racines de l’art brut » 2018, Maison de Victor Hugo à Paris.
https://www.maisonsvictorhugo.paris.fr/fr/expositions/la-folie-en-tete
Vidéo et dossiers de presse disponibles en ligne.
https://www.maisonsvictorhugo.paris.fr/sites/victorhugo/files/cp_dp_visuels/dossiers_de_presse/dp_folie.pdf

Musée de l’Art Brut, Lausanne, Suisse.
Historiquement appelé l’art des fous, l’art brut est réalisé par des artistes « hors-normes » (L’art asilaire, l’art médiumnique, l’art des marginaux et des excentriques).
http://www.artbrut.ch

Exposition « Dés­équi­libre. Névrosés, mélancoliques et psy. », Muséum Dr. Guislain, Gand, Belgique (12 octobre 2019 au 31 décembre 2022).
Ce musée est par ailleurs entièrement consacré à l’histoire de la psychiatrie.
https://www.museumdrguislain.be/fr

Musée d’histoire de la médecine, Paris.
https://u-paris.fr/musee-de-lhistoire-de-
la-medecine/

Pistes pédagogiques

Avec le professeur d’arts plastiques ou HDA, recherches documentaires sur les artistes considérés comme fous et étude de leurs œuvres sous le prisme de la folie.

Avec le professeur de philosophie, questions philosophiques, organiser un débat : les artistes sont-ils forcément fous. Qu’est-ce qu’être fou ? Les représentations du fou (relativité de cette notion), doit-on enfermer les fous ? Liberté et tolérance, évolution de la perception de la folie.

Sciences : recherches documentaires sur les soins, les types de médicaments et effets mais également sur le cerveau et les neurosciences. Réflexion sur l’expérimentation scientifique (cf. Rabelais : « science sans conscience n’est que ruine de l’âme »).

Histoire des sciences et SES : recherches documentaires sur l’évolution du traitement des maladies psychiques et des malades après visionnage de films (Depardon, par exemple) ou lecture de la bd HP.

Recherches iconographiques sur les représentations des fous (photos, dessins etc.), plus particulièrement les folles (cf. Charcot et l’hystérie).

Histoire et histoire des sciences : la naissance de la psychiatrie, l’asile et l’enfermement, les fous de la Grande Guerre : lecture d’ouvrages et visite d’une exposition sur le sujet.

EMC : Droit : La loi et le fou : débat sur l’irresponsabilité pénale, invitation d’intervenants, avocats, chroniqueurs judiciaires, entre autres. Lecture et analyse des chroniques judiciaires des journaux : Le Monde, Charlie Hebdo et / ou réalisation d’une revue de presse sur un procès impliquant cette notion.

Visiter une exposition ou un musée consacré au sujet.

Projet avec le service médical et les psychologues visant à développer la tolérance et l’acceptation des différences chez les élèves.

Dans les programmes

HLP, Terminale
Histoire et violence : les formes de violence sociale
La recherche de soi : Les métamorphoses du moi

Philosophie, Terminale
Notions : L’inconscient

EMC, Sixième à Troisième
Le respect d’autrui : accepter les différences
→ Maladie psychique, inclusion des élèves

Histoire, Première
Thème 4 : La Première Guerre mondiale : Le bilan humain de la guerre
→ Traumatisme psychologique de survivants
https://cache.media.eduscol.education.fr/file/SP1-MEN-22-1-2019/93/9/spe577_annexe2_1062939.pdf

Français, Seconde
Le roman et le récit du XVIIIe siècle au XXIe siècle
→ Une fiction traitant de la folie
https://cache.media.education.gouv.fr/file/SP1-MEN-22-1-2019/92/8/spe575_annexe1_1062928.pdf

Histoire des arts, Première
Mettre en valeur les parentés stylistiques qui rattachent les œuvres et les formes artis­tiques à un artiste, un courant
→ Art brut
https://cache.media.eduscol.education.fr/file/SPE8_MENJ_25_7_2019/15/4/spe263_annexe_
1159154.pdf

STSS, Première
Santé, bien-être et cohésion sociale
Notions : santé individuelle, bien-être – socialisation – normes, valeurs – intégration sociale
https://cache.media.education.gouv.fr/file/SP1-MEN-22-1-2019/55/5/spe642_annexe3_1063555.pdf

Représentations artistiques

Brouillet, André. Une leçon clinique à la Salpêtrière, 1887, Musée d’histoire de la médecine de Paris.

Bosch, Jérôme. La Nef des fous, vers 1500-10, musée du Louvre, Paris (huile sur bois).

Bosch, Jérôme. La Nef des fous, vers 1500-10, musée du Louvre, Paris
Détail © 2015 RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Franck Raux

Dix, Otto. La Folle de Sainte-Marie-à-Py, 1925 (gravure).

Dubuffet, Jean. Dhotel nuancé d’abricot, 1947, Centre Georges Pompidou, Paris.

Egon, Schiele. Autoportrait au coude droit dressé,1914, collection particulière.

Goya, Francisco de. L’Enclos des fou, 1794, Meadows Museum, Dallas.

Soutine, Chaïm. L’idiot, 1920, Musée Calvet, Avignon.

Sitographie

La folie dans la littérature, Bibliothèques de Paris.
https://bibliotheques.paris.fr/la-folie-dans-la-litterature.aspx?_lg=fr-FR
Sélection de livres sur la thématique de la folie

La folie dans l’art, Artsper magazine.
https://blog.artsper.com/fr/la-minute-arty/folie-dans-lart/
Sélection d’œuvres sur la représentation de la folie

Filmographie

Documentaires

Depardon, Raymond.12 jours, Wild Bunch Distribution, 2017. 1 h 26 mn. Trilogie : San Clemente (1982), Urgences (1988).

Muxel, Paul ; Solliers, Bertrand de. Histoires autour de la folie. M de S films, 1993. 1 h 40 mn.

Governatori, Diego. Quelle folie. Les Films Hatari, 2018. 3 h 05 mn.
Sur l’autisme asperger.

Bing, Wang. À la folie. Les Acacias, 2015. 3 h 47 mn. Un hôpital psychiatrique du sud-ouest de la Chine.

Pighetti, Olivier. Folie meurtrière Documentaire. Piments Pourpres/ France Télévisions, 2021. 69 mn. Sur la folie et la justice.

Laclotte, Marine. Folie douce, folie dure. Lardux Films, 2020. 18 mn.
Ce documentaire animé propose une balade dans le quotidien de plusieurs institutions psychiatriques.

Fictions

Brooks, Mel. Frankenstein junior. Michael Gruskoff, 1974. 101 mn. Film sur un savant fou.

Cronenberg, David. A Dangerous Method. RPC, 2011. 93 mn. Histoire de la patiente de Carl Jung.

Forman, Milos. Vol au-dessus d’un nid de coucou. Fantasy Films, United Artists, 1975. 133 mn.

Hitchcock, Alfred. Psychose. Shamley Productions, 1960. 109 mn.

Jonze, Spike. Dans la peau de John Malkovich. Universal Pictures, 1999. 112 mn.

Kubrick, Stanley. Shining. Hawk Films, Peregrine, 1980. 119 mn

Kubrick, Stanley. Docteur Folamour. Columbia Pictures et Hawk Films Ltd,1964. 95 mn. Comédie, militaire fou.

Loach, Ken. Family life. EMI Films, Kestrel Films, 1971. 108 mn.

Laurent, Mélanie. Le bal des folles. Amazon Studios, 2021. 122 mn.

Nuytten, Bruno. Camille Claudel. Lilith films IA, Gaumont, Antenne 2, 1988. 175 mn.

Parker, Alan. Birdy. A&M Films, TriStar,1984. 120 mn.

Soderbergh, Steven. Paranoïa. Fingerprint Releasing, 2018. 98 mn.

Truffaut, François. L’Histoire d’Adèle H.United. Artists, Les Films du carrosse, 1975. 100 mn.

Winocour, Alice. Augustine. ARP Sélection, 2012. 102 mn.

Radio

Le bal des folles de la Salpêtrière (2 épisodes), France Culture, 2020.
Épisode 1 : Le corps exhibé :
https://www.franceculture.fr/emissions/une-histoire-particuliere-un-recit-documentaire-en-deux-parties/le-bal-des-folles-de-la-salpetriere-le-corps-exhibe
Épisode 2 : Jane Avril, la danseuse insoumise :
https://www.franceculture.fr/emissions/une-histoire-particuliere-un-recit-documentaire-en-
deux-parties/jane-avril-la-danseuse-insoumise

Psychiatrie : la folie ordinaire (4 épisodes), Perrine Kervran, France Culture, 2021.
Épisode 1 : La part de folie en nous :
https://www.franceculture.fr/emissions/lsd-la-serie-documentaire/psychiatrie-la-folie-ordinaire-14-la-part-de-folie-en-nous
Épisode 2 : Le destin de la psychiatrie :
https://www.franceculture.fr/emissions/lsd-la-serie-documentaire/psychiatrie-la-folie-ordinaire-24-le-destin-de-la-psychiatrie
Épisode 3 : Infirmiers : les garde-fous de la psychiatrie :
https://www.franceculture.fr/emissions/lsd-la-serie-documentaire/psychiatrie-la-folie-ordinaire-34-infirmiers-les-garde-fous-de-la-psychiatrie
Épisode 4 : En prison sur ordonnance :
https://www.franceculture.fr/emissions/lsd-la-serie-documentaire/psychiatrie-la-folie-ordinaire-44-en-prison-sur-ordonnance