L’esclavage

Cette litanie de dates montre l’évolution de la prise de conscience du caractère génocidaire de la traite négrière telle qu’elle s’est mise en place à partir du 15e siècle2. La loi Taubira parle bien de cet aspect de l’esclavage dans l’article 1 : « La République française reconnaît que la traite négrière transatlantique ainsi que la traite dans l’océan Indien d’une part, et l’esclavage d’autre part, perpétrés à partir du xve siècle, aux Amériques et aux Caraïbes, dans l’océan Indien et en Europe contre les populations africaines, amérindiennes, malgaches et indiennes constituent un crime contre l’humanité. » L’article 2 évoque son enseignement à l’école : « Les programmes scolaires et les programmes de recherche en Histoire et en sciences humaines accorderont à la traite négrière et à l’esclavage la place conséquente qu’ils méritent .»

Un Marron, planche ©éd. Des Bulles dans l’Océan-Denis Vierge

Repères pédagogiques

L’esclavage et les traites sont au programme de 4e, dans le thème 1 : le 18e s., expansions, Lumières et révolutions. Un quart du programme d’Histoire est effectivement consacré aux traites négrières au 18e siècle, soit à l’apogée de ce trafic. Il est explicitement recommandé dans les programmes de ne traiter que cette partie, et non pas les origines de l’esclavage ou sa mise en place.

En classe de 2de, l’esclavage est traité surtout du point de vue des mouvements abolitionnistes, comme partie des mouvements de liberté des nations au 19e siècle, comme le précise le thème 5 du programme : Révolutions, libertés, nations, à l’aube de l’époque contemporaine.

Sites institutionnels

La création d’un comité chargé d’organiser les lieux et actions de commémoration de l’esclavage et de la traite est ordonnée par la loi Taubira. Après plusieurs changements de nom, ce comité devient en 2013 le Comité National pour la Mémoire et l’Histoire de l’Esclavage (CNMHE).  www.cnmhe.fr/
Ce site est très utile notamment pour toutes les informations législatives, et le calendrier des événements autour de la commémoration, notamment à travers sa page :
 www.esclavage-memoire.com/
Attention, certaines pages ne sont pas rafraîchies depuis quelques temps, et la rubrique Enseignement est un peu maigre.

Projet de fondation pour la mémoire de l’esclavage  www.lemonde.fr/politique/article/2018/04/27/une-fondation-pour-la-memoire-de-l-esclavage-sera-creee-en-2018-a-annonce-emmanuel-macron_5291735_823448.html

Organisation des Nations Unies
Le site web de l’ONU regroupe sur une page l’ensemble des ressources qu’elle propose à l’occasion de sa propre journée de commémoration de l’abolition de l’esclavage, le 2 décembre. On y trouve de nombreux textes de lois, déclarations d’intention et qui concernent aussi beaucoup l’esclavage moderne. Il peut être toutefois intéressant de signaler la dimension internationale de la commémoration.  www.un.org/fr/events/slaveryabolitionday/index.shtml

Un laboratoire du CNRS travaille sur les questions de l’esclavage, le Centre International de Recherches sur l’Esclavage (CIRESC). Sur son site, on trouve les travaux du laboratoire  www.esclavages.cnrs.fr, ainsi qu’un lien vers un site pédagogique  http://education.eurescl.eu . Ce dernier n’est pas vraiment à jour, mais certaines pistes peuvent donner des idées de parcours d’expositions.

Les musées

Mémorial de l’abolition de l’esclavage, Nantes. La ville de Nantes possède un grand mémorial de l’esclavage, en lien bien entendu avec le passé de port négrier de la ville.
 http://memorial.nantes.fr/
Le site propose des infos pratiques sur le musée, ainsi que des éléments pour aider les enseignants à préparer leur visite.
 www.chateaunantes.fr/fr/enseignants.
Différents parcours sont proposés, du primaire au lycée. Une sélection de ressources accompagne ces parcours d’exposition. Des expositions itinérantes peuvent également être empruntées.

Association Les anneaux de la mémoire, Nantes. Cette association, créée à la suite de l’exposition éponyme, travaille sur les mémoires de la traite négrière et l’ouverture culturelle entre l’Europe, l’Afrique et l’Amérique.  http://anneauxdelamemoire.org/
Elle propose également la location de matériel d’exposition, mallettes, expositions, etc.
 http://anneauxdelamemoire.org/outils-de-mediation/outils-pedagogiques/

Le mémorial ACTe, Pointe-à-Pitre
Ce mémorial, construit à la place d’une ancienne usine sucrière, est également un lieu d’expression de la culture caribéenne et programme, en plus des expositions permanentes et temporaires, des rencontres, concerts, contes, conférence, etc.
 http://memorial-acte.fr/

La route des abolitions de l’esclavage – Pôle mémoriel du Grand-Est. Ce pôle mémoriel est en fait un réseau de musées ou de lieux de mémoire situés dans l’Est de la France. Il est une association loi 1901 reconnue d’intérêt générale. Sur le site, on trouve l’ensemble des lieux visitables, mais également des ressources mises à disposition, notamment des expositions en prêt et des bibliographies.  www.abolitions.org
Quelques musées de ce réseau ont une page Facebook, notamment la maison de la Négritude à Champagney  www.facebook.com/MaisondelaNegritude/
et l’espace muséographique Victor Schoelcher, à Fessenheim  www.facebook.com/museeschoelcher/

Portrait de Renty, esclave africain, 1850, Les Routes de l’esclavage ©CPB Films

Déroulé de cours en ligne

Un déroulé de cours sur Bordeaux et le commerce triangulaire. http://pedagogie.ac-guadeloupe.fr/lettres_histoire_geographie_lp/bordeaux_et_commerce_triangulaire#attachments

« Les chemins d’une liberté, esclavage et abolitions »  http://pedagogie.ac-guadeloupe.fr/lettres_histoire_geographie_lp/bordeaux_et_commerce_triangulaire#attachments

Dossiers pédagogiques

 https://education.francetv.fr/matiere/temps-modernes/cm1/dossier/l-esclavage-comprendre-son-histoire
Dossier très complet autour de l’esclavage. Attention, il est à destination d’élèves de CM1, certains documents ne seront pas adaptés notamment les dessins animés « Il était une fois… ». Pour le reste, le format court des articles et des vidéos se prêtent très bien à une exposition au CDI, en collège.

 www.inrap.fr/dossier-actualite/sur-les-traces-de-l-esclavage-colonial
Un dossier constitué par l’Institut National de Recherches Archéologiques Préventives sur les fouilles de sites liés à l’esclavage : usines sucrières, plantations, etc.

 www.esclavage-martinique.com/
Chronologie de l’histoire de l’esclavage en Martinique.

 https://gallica.bnf.fr/essentiels/parcours-pedagogiques/esclavage
Ce parcours s’appuie sur les documents de Gallica (iconographie mais également littérature) pour créer un parcours pédagogique avec notamment des questions posées aux lecteurs, qui doivent trouver la réponse dans les documents. Plutôt pour le lycée.

Site Histoire par l’Image  www.histoire-image.org/fr/albums/traite-noirs

Expositions virtuelles

 http://exposvirtuelles.charente-maritime.fr/fr/expositions/la-traite-negriere-rochelaise-au-xviiie-siecle
Exposition virtuelle qui raconte cette fois-ci l’activité négrière de La Rochelle, autre grand port négrier français. On trouve des cartes, des panneaux explicatifs, des fac-similés de documents d’époque, type registres de commerces, etc.

La visite virtuelle d’une habitation sucrerie en Martinique, créée par quatre enseignants. Fiches pédagogiques téléchargeables, iconographie. Une ressource agréable à explorer.
 www.habitation-sucrerie.fr/index.php?lang=fr

 www.thinglink.com/scene/651720949619490817?buttonSource=viewLimits
Une carte Thing Link des principaux ports négriers français, avec des liens vers des ressources pédagogiques type FranceTV éducation. Idéal pour une mise à disposition sur un ordinateur en libre service lors d’une exposition dans l’établissement.

Marché aux esclaves à Zanzibar, Les Routes de l’esclavage ©CPB Films

Les routes de l’esclavage

Les Routes de l’esclavage est un documentaire en quatre parties de 52 minutes qui propose de retracer une histoire de l’esclavage, de l’Antiquité à la fin du xixe siècle, en s’appuyant sur l’ouvrage de l’historienne Catherine Coquery-Vidrovitch3, d’ailleurs conseillère historique du film. Né de la rencontre de trois documentaristes – Daniel Cattier, Juan Gélas et Fanny Glissant –, il s’avère un outil précieux à exploiter en fonction des ressources disponibles ou acquises en CDI pour cette occasion (cf. Ouverture culturelle de ce même numéro) et des possibilités dans votre établissement, lors de séances en co-enseignement avec les collègues d’Histoire-géographie qui ont cette problématique au programme. Résultat d’un travail de cinq ans, d’interviews de quarante historiens et de dix voyages à travers le monde, le film est une grande réussite, aussi bien sur le fond que sur la forme.
Tout d’abord, la forme. Le film est aisé à regarder : le discours est clair, et malgré le sujet tragique, le ton n’est jamais dramatique ou misérabiliste. Pour illustrer des événements précis ou des paroles de contemporains de l’époque, des séquences animées sont intercalées, ce qui permet d’introduire de l’anecdotique dans la suite des explications et interviews, et de varier le rythme du récit. Elles sont réalisées façon aplats de peinture animés, ce qui change des traditionnelles séquences de reconstitution un peu datées, où des acteurs pas toujours excellents amenaient plus de gêne que de compréhension…

Concernant le fond, la problématique du documentaire est la suivante : il s’agit non seulement de comprendre les mécanismes et l’économie de l’esclavage, mais aussi de se demander comment l’Afrique subsaharienne s’est retrouvée au cœur des routes de l’esclavage. Entre le viie et le xixe siècles, ce sont ainsi près de 20 millions d’Africains venus de tout le continent (Akans, Peuls, Yorubas etc. à l’ouest, Somalis à l’est) qui vont être réduits en esclavage et déportés. Comment une traite d’une telle ampleur a-t-elle pu se produire ?

476-1375 : Au-delà du désert

L’esclavage existe dès l’Antiquité, mais ce sont souvent des populations plutôt blanches et géographiquement proches, notamment de l’Empire romain. Si en latin on emploie le mot servus, qui a donné les termes « serf » « servitude », le mot esclave dérive lui du nom des Slaves.
En 476, l’Empire romain s’effondre, laissant la place à d’autres expansions. Au viie s., l’Empire musulman commence ses conquêtes, et a besoin de forces armées mais également de bras pour travailler. L’Islam interdisant d’asservir des musulmans, il faut trouver des forces plus loin. Au ixe siècle, une première traite s’organise entre l’Éthiopie, la Somalie et le monde arabe. Ces esclaves, nommés Zandj, arrivent en masse pour travailler en Mésopotamie. En 869, une révolte très violente marque un coup d’arrêt à cette traite. Petit à petit, Bagdad décline, au profit du Caire. Le marché de l’Afrique intérieure s’ouvre alors, d’autant que les esclaves commencent à se convertir à l’Islam pour échapper à leur condition. Les Arabes cherchent alors plus à l’Ouest, et traitent avec les Berbères, connaisseurs des routes du désert. Une route s’ouvre, reliant Le Caire à Tombouctou, porte de l’Empire du Mali, qui regorge de richesses, notamment d’or. À sa tête, l’empereur Soundiata Keita souhaite développer son pays et entretenir cette relation avec les Arabes. Mais il convertit son pays à l’Islam et les Arabes poursuivent plus au sud leurs recherches.
Entre les viiie et xive siècles, les Arabes ont ainsi déporté et réduit en esclavage près de 3,5 millions d’Africains. Aujourd’hui encore, ces routes transsahariennes sont utilisées par les populations fuyant les guerres et la misère, et tombent encore aux mains des marchands d’esclaves.

1375-1620 : Pour tout l’or du monde

Le Portugal, petit royaume côtier, cherche lui aussi à s’enrichir. En quête d’or bien sûr, mais les esclaves sont aussi une richesse. Plusieurs facteurs poussent les armateurs, encouragés par le roi Henri Le Navigateur, à chercher des voies de commerce vers l’Atlantique : contourner les Arabes présents dans le Sahara pour débarquer directement sur les côtes d’Afrique noire d’une part, d’autre part la place même de Lisbonne, seule capitale européenne donnant directement sur l’Atlantique. Les Portugais se lancent à l’assaut de l’Océan. Ils ne restent pas longtemps seuls : lorsqu’en 1453 Constantinople tombe, la route commerciale avec les Arabes et les Ottomans est coupée. L’Europe se lance à son tour sur la route atlantique : Flamands, Génois, Vénitiens suivent les Portugais. En 1471, ceux-ci s’installent alors sur l’île Saõ Tomé, d’où ils commercent avec le royaume Kongo, qui n’avait pas été en contact avec les musulmans. Le roi se convertit au christianisme, la noblesse s’entiche des nouveautés amenées par les Portugais. Ils s’y retrouvent en situation de monopole commercial. Toutefois, c’est toujours l’or qui les intéresse, et celui-ci se trouve dans l’actuel Ghana : se met alors en place une première forme de commerce triangulaire entre le royaume Kongo, les mines d’or et Saõ Tomé.
Sur l’île, les Portugais mettent en place le modèle économique de la plantation, en l’occurrence de canne à sucre. Le sucre est un produit très demandé, donc vendu cher, et est produit par une main-d’œuvre gratuite : c’est un modèle très rentable. Il est ainsi exporté rapidement au Brésil, découvert en 1500. Le sucre et la traite négrière qui en permet la culture deviennent ainsi la principale source de revenus pour la couronne portugaise. Toutefois, notamment à Saõ Tomé, une telle concentration de population opprimée conduit à des soulèvements : malgré la politique de « métissage » visant à défendre les intérêts des colons, une violente révolte éclate en 1595. Les Portugais abandonnent Saõ Tomé ; les plantations et les esclaves sont transférés vers le Brésil et les Caraïbes, au climat propice à la culture de la canne.
En 1620, les Portugais sont les maîtres incontestés de la traite négrière, 1 million d’Africains ont ainsi été déportés entre le xve et le xviie siècle.

1620-1789 : Du sucre à la révolte

Les nations se livrent à une guerre du sucre : 75% des esclaves sont déportés à cause du sucre. Les Antilles offrant les mêmes conditions que Saõ Tomé, la Hollande, l’Angleterre, la France font la guerre aux Espagnols et aux Portugais pour s’implanter dans la région. La reine d’Angleterre Elisabeth Ire encourage et finance ces raids corsaires.
Dans les plantations, les conditions sont extrêmement difficiles : à cause de la dureté du travail, les femmes tombent rarement enceintes, et le taux de mortalité infantile est très élevé. De plus, l’espérance de vie dépasse rarement les dix ans. Il y a donc un besoin constant de main-d’œuvre renouvelée.
Dans ce contexte, le système bancaire et d’assurances de l’Angleterre se développe, pour financer et assurer les grandes expéditions négrières. Les ports négriers se développent : Liverpool, Anvers, Nantes, La Rochelle, Bordeaux. L’argent de l’esclavage enrichit considérablement ces villes, et irrigue tout le pays. Souhaitant profiter de la situation, Louis XIV arme la France, mais la flotte ne fait pas le poids face à l’Angleterre ou la Hollande. La guerre a lieu sur les flots mais également sur les terres africaines : tout le long de la façade atlantique, des forts européens s’élèvent et sont de véritables enjeux stratégiques. Le commerce se poursuit avec les chefs de guerre locaux : les Européens vendent du métal, des objets, du tabac… en échange de captifs. C’est durant cette période que se met réellement en place la superposition de l’apparence et du statut, l’opposition entre les « Noirs » « Nègres », qui regroupent l’ensemble des populations noires toutes nations confondues, et les « Blancs », appelés ainsi par les esclaves des Caraïbes pour qui les oppresseurs n’étaient pas non plus issus de différentes nations.
En 1685 paraît en France le Code Noir. Ce code est une première tentative de régir les rapports entre maître et esclave, notamment en fixant des limites à la violence. Il est toutefois bien peu appliqué.
Dans les plantations, le feu de la révolte couve : de plus en plus d’esclaves se sauvent et se réfugient dans les forêts tropicales, on les appelle neg’marrons, terme dérivé de l’espagnol cimarron, qui désigne du bétail retourné à la vie sauvage. À partir des années 1720, les Caraïbes connaissent une flambée de violence qui met à mal l’industrie du sucre et de la traite. Dans les années 1780, l’opinion publique commence à s’émouvoir du sort des esclaves, des mouvements abolitionnistes se font entendre. Fin xviiie s., l’esclavage semble en perte de vitesse et décrié de par le monde.

1789-1888 : nouvelles frontières de l’esclavage

Mandy, cuisinière asservie à une famille d’Austin, Texas, 1865 ©AustinHistoryCenter/CPB Films

Les Blancs commencent à développer une grande peur des Noirs, tant ils craignent un soulèvement, à l’image de ce qui s’est passé en 1791 à Saint-Domingue. Menée par Toussaint Louverture, cette guerre dure douze ans, et se solde par une défaite de Napoléon Ier. En 1804 est proclamée la première république noire au monde : Saint-Domingue devient Haïti. C’est un très grand choc économique, dans une période de grande demande.
Les esclavagistes quittent Haïti et implantent les méthodes de culture intensive aux États-Unis (coton), à Cuba (sucre) et au Brésil (café). On passe à une économie de masse, avec une augmentation du rendement par esclave : à cette époque, l’Europe consomme massivement ces produits issus des colonies.
En Angleterre, les centres financiers se détournent peu à peu de l’esclavage et cherchent à investir dans les filatures locales : la traite finit par être abolie en 1807 et l’esclavage en 1833. À partir de 1815, elle oblige les autres pays à abandonner les routes de la traite négrière dans l’Atlantique nord4. Les esclaves nés aux Caraïbes sont emmenés aux États-Unis où la culture du coton se développe le long du Mississippi.
Entre 1815 et 1850, le Brésil continue la traite illégalement dans l’Atlantique sud : à Rio de Janeiro, pour un Blanc on compte quatre Noirs qui traversent l’Atlantique. Le principal port d’échange négrier est désormais Zanzibar, sur la façade Est de l’Afrique. Les États-Unis mettent en place l’esclavage industriel, et encouragent les naissances, quitte à en passer par le viol5.
Toutefois, tout au long du xixe s., les idées abolitionnistes gagnent du terrain : les États-Unis sont embarrassés, ils ne souhaitent pas être distancés par les idées progressistes européennes, mais ce sont les planteurs du Sud qui tiennent l’économie. En 1861 éclate la guerre de Sécession, qui fera des ravages entre le Nord abolitionniste et le Sud esclavagiste. En 1865, les Nordistes gagnent la guerre et l’esclavage est aboli. Dans les faits, les Noirs restent des citoyens de seconde zone, cantonnés aux tâches subalternes, n’ayant ni droit de vote, ni liberté de circulation.
1873 : les Européens, sous couvert de lutter contre la traite, contrôlent puis occupent les côtes africaines. Si la traite se termine avec Zanzibar, progressivement les colons s’enfoncent dans le continent pour faire main basse sur les richesses. L’esclavage n’existe plus, mais les colons font appel au travail forcé pour exploiter café, sucre, cacao, coton, caoutchouc. Des aventuriers comme Stanley6 achètent à vil prix des pans entiers du Congo au profit du roi des Belges Léopold II. Même les missions d’évangélisation ont une position ambiguë : il s’agit bien sûr d’instruire et de soigner les Africains, tout en affichant une « supériorité ».
En 1888, le Brésil est le dernier pays d’Amérique à abolir l’esclavage, c’est la fin de 450 ans d’esclavage, avec l’idée que le pays devait se « civiliser », « progresser ». Mais alors que faire de tous ces Noirs ? On veut « blanchir » la population, en encourageant la migration de milliers d’Européens pauvres.
C’est la fin de l’époque des grandes traites négrières, qui auront entraîné la mort de 50 millions d’Africains entre le viie et le xixe siècle.

Femmes esclaves du harem du sultan de Zanzibar, entre 1890 et 1900 ©CPB Films

C’est sur ce chiffre terrible que se conclut ce documentaire. Ce résumé est loin d’être exhaustif ; il n’inclut bien entendu pas tous les éclairages d’universitaires du monde entier, qui apportent moult précisions, mais qu’il aurait été fastidieux de retranscrire. Un détail m’a intéressée : ce film retrace une histoire de l’esclavage à l’échelle mondiale, et ne cherche ainsi pas à entrer dans toutes les dates qui jalonnent chaque Histoire nationale. Cela permet de sortir du côté « Histoire de France », qui n’est d’ailleurs pas de mise dans les programmes7, et de comprendre que la France n’est qu’un rouage dans l’Histoire du monde et pas son pivot.