De la Piratebox vers la Bibliobox

Conçue en 2011 par David Darts, professeur à l’université de New-york, la Piratebox1 est un dispositif open source2 qui permet le partage et l’échange de fichiers numériques (livres, sons, images, vidéos…) de façon anonyme et sécurisée et sans aucune connexion internet. Issue de la communauté du libre et du mouvement du Do It Yourself, la Piratebox porte des valeurs militantes avec la volonté de défendre un réseau libre et ouvert et de s’affranchir du Web tel que nous le connaissons : fichage, vente de données personnelles, publicités ciblées etc.
Concrètement, le dispositif se compose d’un routeur, dont l’usage initial a été détourné, et d’une clé USB pour le stockage de fichiers. Une fois configuré3, il génère un réseau wifi autonome sur un périmètre d’une dizaine de mètres auquel on peut se connecter librement via un ordinateur portable, une tablette tactile ou un smartphone. Les fichiers présents sur la clé USB peuvent être téléchargés par l’utilisateur ou consultés en streaming.
Percevant dans la Piratebox, de nouvelles possibilités de médiation numérique, Jason Griffey, un bibliothécaire américain, a eu l’idée en 2012 d’adapter le dispositif pour un usage en bibliothèque : il le renomme Librarybox, devenu Bibliobox dans les pays francophones. Pour éviter le risque d’échanges illégaux de fichiers entre les utilisateurs, il apporte quelques modifications au projet de base et fait de la Librarybox « une bibliothèque portable, qui peut littéralement aller partout, dans laquelle on peut uniquement télécharger »4.

La PédagoBox : pour un usage en établissement scolaire

La Bibliobox a fait son apparition il y a quelques années dans les établissements scolaires. Dans un contexte pédagogique, on parle généralement de Pédagobox. Cherchant à pallier l’absence de connexion internet dans les salles de classe, des enseignants ont vu, dans ce dispositif, une solution alternative pour proposer à leurs élèves des supports de cours multimédias5. Une fois connectés au réseau généré par la Pédagobox, les élèves peuvent accéder aux fichiers déposés par l’enseignant et les télécharger librement sur leur terminal. En fonction du paramétrage de départ, ils peuvent même, à leur tour, déposer des productions.

La CDIBox : une opportunité pédagogique de promouvoir les communs

Du côté des CDI, la Pédagobox, rebaptisée CDIBox, fait de plus en plus d’émules6. Séduits par l’aspect nomade du dispositif, le faible coût de l’installation (une cinquantaine d’euros) et la possibilité de compléter un fonds de ressources numériques souvent inexistant, les professeurs documentalistes s’en emparent pour répondre à une double mission : mettre à la disposition des enseignants et des élèves des ressources qui répondent à leur besoin et, participer à la diffusion des Communs de la connaissance.
Dans un monde où les jeunes ont le sentiment de pouvoir accéder gratuitement à des milliers de contenus sur le Web, le domaine public est une notion difficile à intégrer. La CDIBox, dont le fonctionnement s’inscrit au cœur des pratiques culturelles quotidiennes, peut être un outil efficace pour éduquer aux Communs. Passée la déception de ne pas avoir trouvé le dernier épisode de Games of Thrones dans la multitude des ressources à télécharger, de nombreuses activités peuvent être envisagées pour permettre à l’élève de passer du statut de « consommateur » à celui de « créateur » : ateliers d’écriture à partir d’images d’archives, réalisation de book trailer(bande-annonce de livre sous format vidéo) à partir d’images libres de droit ou encore ateliers mash-up7 pour aboutir à la création d’une nouvelle œuvre placée, à son tour, dans le domaine public. Outil idéal pour stocker la matière première d’une création, instrument pour diffuser des oeuvres créées par les élèves ou étagère virtuelle venant compléter le fonds du CDI, la CDIBox est en passe de devenir indispensable à tout professeur documentaliste désireux de promouvoir les Communs.