Nous avons tous été sidérés fin janvier dernier par le gel unilatéral, brutal et inattendu de la part collective du Pass Culture et par la débandade qui s’est ensuivie : communication imprécise de dernière minute de la part des DAAC, saturation de la plate-forme Adage, sauve-qui-peut des projets culturels avec des arbitrages impossibles dans les établissements, mise en danger de certains partenaires culturels. Comment imaginer que le budget du Pass Culture collectif ait été volontairement sous-évalué, misant sur le non-engagement des enseignants dans ce dispositif ? Alors même que les collectivités territoriales se désinvestissent massivement des budgets et subventions culturelles allouées aux établissements, comment imaginer que le robinet du financement Pass Culture, seule planche de salut pour monter des projets, soit subitement fermé, sans préavis, sans concertation, sans explication ? Comment imaginer un tel déni du travail engagé par tous les référents culture et tous les enseignants, que l’on piétine au nom des coupes budgétaires, ou pire, de l’impréparation du budget ? Le Ministère déclare donner entre 20 et 30 € par élève mais en réalité, il ne les a pas… Un tel manque de respect envers la communauté éducative et envers tous les élèves lésés par ces bricolages financiers est tout simplement insupportable et porte un coup au moral, à la motivation et à l’investissement – pas financier non ! mais bien humain – dans la mise en œuvre de l’ouverture culturelle, pourtant plus que jamais nécessaire aux élèves. Selon « l’adage » du Ministère, l’objectif reste toujours de « garantir à chaque élève, quel que soit son milieu d’origine, un accès équitable à la culture », paroles vaines lorsque l’on scie la branche sur laquelle on est assis…

Semons donc la culture de toutes nos forces ! Culture de l’information et de la donnée d’abord, puisque ce numéro tisse les liens d’une EMI ancrée dans la littératie numérique, que ce soit à travers l’article d’Olivier Le Deuff sur les enjeux de l’Open Source Intelligence (OSINT), méthode d’investigation, d’enquête et de repérage d’indices en ligne, inspirante pour les compétences à développer en littératie numérique, ou encore à travers l’article d’Ugo Verdi, Camille Capelle et Anne Lehmans, sur les enjeux info-documentaires de la littératie des données. En écho à la référence à Suzanne Briet et à sa théorie du document, citée par Le Deuff, nous vous proposons également une présentation de la réédition numérique, à l’initiative d’Arthur Perret, de l’essai Qu’est-ce que la documentation ? de cette même autrice.

Semons aussi les cultures du jeu et de l’autonomie telles que décrites par Mélody Bruccoleri Audiber, dans le cadre de la constitution d’une ludothèque, organisée et animée par des élèves de sections professionnelles en une démarche de projet menée d’un bout à l’autre. Autonomie, confiance en soi, autant d’objectifs également mobilisés dans la construction de l’environnement personnel d’apprentissage, dont nous proposons ici une synthèse dans une fiche pratique à destination des enseignants. Ces graines de culture semées auprès des élèves pour développer leur autonomie et leur capacité d’agir se transforment en forêts littéraires que l’on retrouve dans le domaine de la fiction avec le thèmalire ressourçant et poétique sur les arbres de Delphine Laurent.

Alors, semons la culture, celle de l’information mais aussi celle de l’engagement, partout autour de nous, avec Pass’-ion !