« Tu fais des bulles de silence dans le désert des bruits ». Ce vers de Paul Eluard (Facile, 1935) pourrait constituer une citation intéressante à mettre en exergue au CDI pour allier Printemps des Poètes et règles de vie du lieu, en un clin d’œil poétique. Cette phrase peut également s’apparenter au fil conducteur de ce numéro d’Intercdi.
Bruit et silence, le yin et le yang de nos vies au CDI, la beauté du doux bourdonnement des élèves au travail ou du calme après la déferlante de la récréation ; l’agacement et l’agressivité des décibels qui montent lorsque l’espace est saturé de sons. Comment gérer cet éternel dilemme ? Timothée Mucchiutti s’est penché sur cette question dans sa fiche pratique, grâce à une réflexion sur l’aménagement de l’espace et sur l’éducation à la santé par la sensibilisation au bruit et à ses risques auprès des élèves.
Le silence du temps qui s’étire et qui paresse ensuite, dans l’ouverture culturelle de Sophie Dremeau qui donne un avant-goût de vacances, en proposant par exemple aux lecteurs estivaux de se mettre en scène avec le livre emprunté pour les vacances, de manière à créer une carte postale poétique exposée au CDI à la rentrée suivante. Le silence des non-dits et des secrets de famille ou a contrario le bruit des jeux d’une fratrie font également écho au thémalire de Mélanie Davos qui dresse une sélection de fictions sur la famille.
Envelopper nos existences d’un silence documentaire qui effacerait toute trace numérique, c’est ce qu’analyse Olivier Le Deuff dans son article Indexation des connaissances versus indexation des existences. Citant Colin Koopman, « le scénario est effrayant : tout le monde autour de vous est bien attaché à ses données alors que [si] vous êtes sans données, sans informations, et par conséquent vraiment sans défense, que feriez-vous de vous-même ? Que pourraient faire de vous les autres ? » Comment combiner la transparence permanente des individus indexés à l’aune des algorithmes numériques et la nécessaire classification des connaissances, au fondement même du savoir ? Pour y répondre, Olivier Le Deuff convoque la figure tutélaire de Guillaume de Baskerville (Le Nom de la Rose, U. Eco), personnage qui était « mû par l’unique désir de la vérité, et par le soupçon (…) que la vérité n’était pas ce qu’elle lui paraissait dans le moment présent ». Une définition possible de l’ÉMI, en quête d’esprit critique et de fiabilité de l’information ?
Enfin, la calme concentration du lecteur attentif alors que l’imagination galope dans son esprit ou le bruit effervescent d’une animation ludique autour du Défi Babélio : voilà de quoi nourrir nos envies d’activités de promotion de la lecture, grâce à l’article de Corinne Paris sur le désormais célèbre défi participatif. Une manne d’idées et de possibilités à explorer autour de cette sélection annuelle de romans et de BD… avant d’aller fureter dans la première librairie ouverte sur le métavers, comme le signale, entre autres pépites, la veille numérique de Gabriel Giacomotto.
Silence, on lit, on indexe, on réfléchit, on agit !